Rick Wagoner, l'homme providentiel qui devait sauver General Motors (GM) lorsqu'il en a pris la tête en juin 2000, a finalement présidé à la chute du géant automobile américain, avant de démissioner sur demande de la Maison Blanche.

Ayant fait toute sa carrière, dès sa sortie de l'université de Harvard, en 1977, au sein de ce qui fut longtemps le numéro un mondial de l'automobile , M. Wagoner est l'un des plus jeunes patrons qu'ait connu General Motors (GM). Il a travaillé pour le groupe en Europe, au Canada et au Brésil, où il fut directeur général en 1991 et 1992, gravissant peu à peu tous les échelons de l'entreprise jusqu'à en devenir président en octobre 1998 puis PDG en juin 2000.

Aujourd'hui âgé de 56 ans, cet homme d'un mètre quatre-vingt-dix qui a conservé l'allure athlétique du joueur de basket qu'il fut dans son jeune temps semblait avoir engagé son groupe sur la voix du redressement dans la première moitié des années 2000 après avoir fait accepter à ses employés et aux syndicats la fermeture d'une douzaine d'usines et la suppression de 30.000 emplois, tout en demandant des concessions salariales pour parvenir à réaliser 7 milliards de dollars d'économies par an.

Mais ceux-ci lui voueront une haine tenace et n'ont semblé trouver en lui un allié qu'au cours des derniers mois, lorsqu'il est apparu que le groupe ne pourrait plus survivre que grâce à une aide d'urgence de l'Etat.

M. Wagoner et le dirigeant du puissant syndicat des ouvriers de l'automobile (UAW) Ron Gettelfinger étaient venus alors plaider leur cause côte-à-côte devant les parlementaires américains.

Mais pour nombre d'élus, notamment républicains, M. Wagoner est l'incarnation même d'un modèle économique qui a fait les preuves de son inefficacité pour ne pas dire de son incurie.

De fait, GM n'est pas parvenu sous sa direction à s'adapter à la réalité de l'époque, et notamment aux attentes d'Américains de plus en plus demandeurs de voitures plus petites et moins gourmandes en carburant, que leur fournissent les constructeurs japonais.

Sous sa direction également, GM a perdu sa couronne de premier constructeur mondial au profit de Toyota, et accumule les pertes (31 milliards de dollars en 2008, 86 milliards depuis 2005).

Pourtant, rationalisation et réduction des coûts ont été au coeur de sa gestion de GM au cours des presque neuf ans qu'il a passé à la tête de l'entreprise, et celle-ci est aujourd'hui sans conteste bien moins tentaculaire qu'elle ne l'était en juin 2000.

L'un de ses chevaux de bataille aura été de développer une base de modèle pouvant servir pour tous ses marchés plutôt que de développer des véhicules spécialement pour les États-Unis ou pour l'Europe ou pour la Chine.

Mais sa capacité à changer les choses aura longtemps été mise en cause.

En 2006, alors que la situation de GM empire, il manque d'être remercié en mars à la suite d'une fronde au sein de son conseil d'administration.

Il ne sauve sa tête qu'en menaçant de démissionner sur le champ en laissant GM sans patron alors que les observateurs sont de plus en plus nombreux à évoquer, déjà, une faillite du groupe.

Les difficultés de l'équipementier Delphi, son ex-filiale faillie, et la crise financière qui a fait chuter les ventes du groupe n'ont certes pas facilité la tâche de cet homme marié et père de trois enfants, qui ne réussira pas son pari de relever GM.

Il disait encore il y a une dizaine de jours ne pas se sentir menacé par les projets de M. Obama pour sauver l'industrie automobile américaine.