L'imposition par l'administration Trump de tarifs douaniers sur l'aluminium est une décision «mal avisée» qui pénalisera d'abord les Américains, a déclaré jeudi le premier ministre Philippe Couillard.

«C'est encore une mauvaise décision, une décision mal avisée des Américains, et qui va les blesser, eux, au moins autant sinon plus que nous», a dénoncé le premier ministre, jeudi.

Le président Donald Trump a annoncé en matinée que son gouvernement va taxer les importations d'acier et d'aluminium aux États-Unis. Il a évoqué des tarifs douaniers de 25 % pour l'acier et de 10 % pour l'aluminium sans toutefois spécifier quels pays seront visés.

Cette mesure pourrait avoir des effets importants au nord de la frontière. Le Canada est le quatrième producteur mondial d'aluminium et près de 90 % de sa production se trouve au Québec. Les neuf alumineries québécoises ont produit environ 3 millions de tonnes du métal en 2015.

M. Couillard s'explique mal la décision de Washington, d'autant plus que la production américaine d'aluminium est minime. Il rappelle que l'industrie américaine de la défense s'oppose à l'imposition de tarifs douaniers en invoquant la nature stratégique du métal.

«Tout ce qu'ils vont faire, c'est nuire à leur industrie, notamment à leur industrie de défense», a-t-il dit.

Ultimement, ce sont donc les entreprises et les consommateurs qui pâtiront de la mesure américaine, selon le premier ministre, comme ce fut le cas lorsque Washington a imposé des tarifs douaniers sur le bois d'oeuvre.

«Ce sont des effets de spectacle qu'on fait sur le commerce qui ne sont pas justifiés, qui vont être nocifs pour l'économie américaine», a déploré M. Couillard.

Lors d'un voyage à Washington, la semaine dernière, le premier ministre et son homologue ontarienne Kathleen Wynne ont proposé de mettre sur pied une «stratégie continentale» pour répondre aux pays qui pratiquent le «dumping» d'acier et d'aluminium.

Une taxe américaine sur l'acier serait «inacceptable» pour le Canada

À Ottawa, le ministre du Commerce international François-Philippe Champagne a assuré que son gouvernement ne se laisserait pas faire.

«On suit la situation de très près. Tout tarif ou quota qui pourrait être imposé à l'industrie de l'aluminium ou de l'acier serait complètement inacceptable. Une telle décision aurait évidemment des impacts des deux côtés de la frontière, on l'a souvent dit. Et nous serons toujours là pour défendre les travailleurs, les travailleuses et l'industrie de l'aluminium et de l'acier au Canada», a-t-il martelé.

«Toute suggestion (voulant) que le Canada pourrait poser une menace à la sécurité nationale des États-Unis en matière de commerce est complètement injustifiée. Nous sommes les plus grands partenaires des Américains quand on parle d'acier, alors évidemment, nous on va répondre si les États-Unis décident de prendre des mesures.»

Le ministre Champagne n'a toutefois pas précisé quel mécanisme de défense il utiliserait, se contentant d'indiquer que les Canadiens ont vu son gouvernement à l'oeuvre dans des dossiers comme ceux de Boeing ou du bois d'oeuvre.

La ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, était aussi outrée que son collègue. «En tant qu'allié clé de NORAD et de l'OTAN, ainsi que premier acheteur d'acier américain, le Canada considérerait que toute restriction commerciale sur l'acier et l'aluminium est tout à fait inacceptable», a-t-elle déclaré par communiqué.

Mme Freeland a rappelé que le Canada achète plus d'acier américain que tout autre pays au monde, achats qui représentent 50 % des exportations américaines dans le domaine.

À l'instar de M. Champagne, elle a fait état de représailles éventuelles, sans en préciser la nature. «Nous défendrons toujours les entreprises et les travailleurs canadiens. Si des restrictions devaient être imposées aux produits d'acier et d'aluminium canadiens, nous prendrons les mesures nécessaires pour défendre nos intérêts commerciaux et nos travailleurs.»

- Avec La Presse canadienne