La banque centrale américaine (Fed) a de nouveau opté pour la prudence mercredi en laissant ses taux d'intérêt inchangés sur fond de croissance modeste aux États-Unis, mais une hausse est sur les rails pour la fin de l'année.

À l'issue d'une réunion de deux jours à Washington, son comité de politique monétaire (FOMC) a, sans surprise, décidé de maintenir ses taux directeurs dans leur fourchette actuelle (entre 0,25 et 0,50%), suspendant de nouveau la normalisation monétaire entamée en décembre dernier après sept ans de politique de taux zéro.

Mais, fait nouveau, la banque centrale assure désormais que les arguments en faveur d'une nouvelle hausse se sont «renforcés», même si elle dit attendre «pour le moment» de nouveaux progrès vers ses deux objectifs, le plein emploi et une inflation annuelle évoluant autour de 2%.

Pour appuyer ce diagnostic, le FOMC relève notamment que l'activité économique américaine a récemment «accélérée» après avoir connu une croissance «modeste» pendant la première moitié de l'année.

Dans son communiqué, elle assure également que les gains d'emplois ont été «solides», avec un taux de chômage de 4,9%, et que les dépenses de consommation des ménages, moteur de la croissance américaine, ont «fortement» progressé.

Après avoir affirmé que les risques à court terme avaient «diminué», le FOMC assure par ailleurs qu'ils semblent désormais globalement «équilibrés».

Guetté par les marchés, inquiets de la fin de l'ère de l'argent pas cher, un resserrement monétaire semble donc bien à l'agenda de la Fed. La majorité de ses membres prévoient désormais une seule hausse avant la fin de l'année, alors qu'ils tablaient auparavant sur deux relèvements, selon des projections publiées mercredi.

Division au sein du Comité

«Nous sommes d'une façon générale satisfaits de voir comment l'économie des États-Unis se comporte», a affirmé la présidente Janet Yellen lors d'une conférence de presse. «La plupart d'entre nous (au sein du Comité) estimons que les arguments pour une hausse immédiate ont augmenté, mais il est plus opportun d'attendre de voir davantage de progrès», a-t-elle affirmé répétant que l'économie «n'était pas en surchauffe».

Cette ligne n'a toutefois pas fait l'unanimité au sein du Comité monétaire. Signe des divisions croissantes entre ses 10 membres votants, trois d'entre eux ont refusé de soutenir la décision prise mercredi et auraient souhaité que la banque centrale remonte immédiatement ses taux de 0,25 point.

Un tel niveau de division au sein de l'institution n'a pas été vu depuis décembre 2014. «Les faucons» qui veulent contenir l'inflation en remontant les taux plus vite «ont vraiment essayé de persuader leurs collègues frileux de relever les taux», a noté Ian Shepherdson de Pantheon Macroeconomics.

Mme Yellen a souligné qu'une majorité de membres du Comité envisageait une hausse des taux d'ici la fin de l'année, comme cela est visible dans la publication de leurs projections.

«La Fed est fermement dans les rails pour un relèvement en décembre, même si sur les deux prochaines années la trajectoire des taux va être plus progressive que prévu», a commenté Paul Ashworth, économiste pour Capital Economics.

Pas de politique partisane

Pour justifier le statu quo, la banque centrale estime que la reprise reste encore fragile et qu'un tour de vis monétaire pourrait la freiner: l'investissement des entreprises reste «faible» et l'inflation continue d'évoluer loin de son objectif de 2% (+0,8%, selon l'indice PCE).

Dans ses nouvelles projections économiques, la Fed a d'ailleurs de nouveau abaissé sa prévision de croissance économique cette année aux États-Unis et s'est montrée également légèrement plus pessimiste sur le front de l'emploi comme de l'inflation.

Le produit intérieur brut (PIB) américain devrait progresser de 1,8% sur un an au dernier trimestre 2016, soit 0,2 point de moins que ce qui était prévu il y a trois mois. Le taux de chômage devrait s'établir à 4,8% cette année, soit 0,1 point de pourcentage de plus que prévu en juin.

Si les risques pour les perspectives économiques sont désormais «équilibrés», la Fed assure qu'elle continuera à surveiller «étroitement» l'évolution de la situation économique internationale.

À l'approche de l'élection présidentielle du 8 novembre, Mme Yellen a également tenu à défendre l'impartialité de la Fed, mise en cause par le candidat républicain Donald Trump. Il avait accusé la banque centrale de maintenir des taux bas pour faire le jeu des démocrates.

«Je peux dire catégoriquement que la politique partisane ne joue aucun rôle dans nos décisions sur les orientations de politique monétaire», s'est défendu Mme Yellen.

Yellen à Trump: la politique ne joue «aucun rôle» à la Fed

La présidente de la banque centrale américaine Janet Yellen, accusée par Donald Trump de faire le jeu des démocrates, a assuré mercredi que la politique ne jouait «aucun rôle» dans les décisions de la Fed.

«Je peux dire catégoriquement que la politique partisane ne joue aucun rôle dans nos décisions sur les orientations de politique monétaire», a déclaré Mme Yellen à l'issue d'une réunion de la Fed qui a décidé de maintenir ses taux proches de zéro.

Mi-septembre, le candidat républicain à la Maison-Blanche Donald Trump avait assuré que la Fed gardait ses taux directeurs «artificiellement bas» afin de complaire au président Barack Obama et de lui permettre de quitter le pouvoir sans avoir à faire face aux conséquences d'une hausse des taux.

Mme Yellen devrait «avoir honte d'elle-même», avait clamé M. Trump.

Sur un ton bien plus mesuré, la présidente de la Fed lui a répondu en assurant que les considérations politiques n'étaient pas «discutées» lors des réunions de politique monétaire de la Fed.

«Le Congrès a très judicieusement fait de la Banque centrale une agence indépendante afin de mettre la politique monétaire à l'abri des pressions politiques à court terme», a ajouté Mme Yellen qui a été nommée à ce poste par le président Obama.