Le jour ne s'est pas encore levé, mais une dizaine de personnes se pressent déjà devant une agence de travail temporaire à Williston.

La petite ville américaine vibrait il y a peu de l'arrivée de milliers d'employés venus profiter du boum pétrolier, mais les moins qualifiés luttent désormais pour décrocher un petit boulot.

«Ils n'ont pas beaucoup de travail pour nous en ce moment», témoigne dans l'air frais du petit matin Heather Scallion, qui a fait plus de 1300 kilomètres pour venir jusqu'ici, pensant qu'on y trouvait encore beaucoup d'emplois.

Mais cette ville du Dakota du Nord, située à moins d'une heure de la frontière canadienne, ne frémit plus de la même activité qui l'agitait encore il y a quatre ans, avant le plongeon des cours du pétrole qui ont précipité de nombreux licenciements.

«Je galère vraiment, j'ai besoin d'argent, sincèrement», confie Heather Scallion devant l'agence Central Command.

La situation est bien différente à quelques minutes à peine de cette agence de travail temporaire. Au service public pour l'emploi de cet État du nord des États-Unis, Job Service North Dakota, on a du mal à trouver des employés hautement qualifiés pour les postes de maintenance des forages et des pompes à pétrole.

Le Dakota du Nord semble montrer des signes d'amélioration, maintenant que les cours du pétrole ont renoué avec le seuil des 40 dollars le baril après un plongeon sous les 30 dollars en début d'année.

«Il y a eu des licenciements quand le pétrole a vraiment flanché», se souvient Cindy Sanford, responsable des bureaux locaux de l'agence à Williston. «Maintenant les entreprises recrutent à nouveau».

Mais la reprise n'est pas la même pour tous.

La population a doublé

Les bureaux de Command Center sont situés juste en face des rails du train qui ne transporte plus de charbon, de bétail ou de céréales, mais du pétrole brut extrait des immenses réserves profondément enfouies sous le sol, dites de Bakken et Three Forks.

Lorsque la fracturation hydraulique, ou «fracking», et les techniques horizontales de forage ont permis d'accéder plus facilement à ces réserves, Williston s'est convertie en épicentre de la production pétrolière du Dakota du Nord.

Le secteur a transformé l'économie de cet État rural aux immenses plaines, devenu coeur dynamique d'activités et d'emplois dès 2010, alors que le reste des États-Unis peinait encore à se relever de la grande crise de 2008.

En période de pleine expansion, les employés peu qualifiés pouvaient facilement gagner 18 dollars de l'heure et la population de Williston a doublé en quatre ans, jusqu'à environ 30 000 personnes.

Puis le prix du pétrole s'est effondré, depuis des sommets à plus de 100 dollars en 2014 jusqu'à moins de 30 dollars, poussant de nombreux foreurs à fermer et licencier des milliers d'employés.

Depuis son camion, Monty Besler désigne les alignements d'autos-caravanes ayant accueilli les nombreux employés qui venaient travailler à la ville à l'époque du boum. Ils sont vides aujourd'hui.

«Nous avons perdu de nombreuses entreprises», souligne ce consultant dans le secteur pétrolier. «Il va y avoir un écrémage et les groupes les plus forts survivront».

Son analyse est appuyée par des perspectives d'amélioration: les analystes s'attendent désormais à ce que la production de pétrole se stabilise en 2017, les puits aux États-Unis devenant plus efficaces et productifs, selon the US Energy Information Administration.

«Un nouveau boum, mais quand?»

Mais même si l'emploi repart, les salaires sont en général plus bas qu'au moment de l'expansion, analyse Raoul LeBlanc, chez IHS.

La ville de Williston compte en tout cas sur le pétrole pour soutenir l'économie pendant encore longtemps, prévoyant un milliard de dollars d'investissement dans de gros travaux d'infrastructures, routes, ponts et même un nouvel aéroport.

Les entreprises luttent déjà à nouveau pour attirer les salariés. Quelque 56 sociétés se pressaient récemment lors d'un salon pour embaucher 300 personnes. Mais l'optimisme ne parvient pas jusqu'à l'agence temporaire Command Center, où on ne s'attend pas à ce que ces emplois concernent rapidement les moins qualifiés.

Le responsable de l'agence, Kyle Tennessen, est convaincu que les choses s'amélioreront un jour: «Il va y avoir un nouveau boum», prédit-il. «Mais quand? C'est la grande question».