Les créations d'emplois aux États-Unis ont nettement marqué le pas en janvier, trahissant un ralentissement qui pourrait inciter la banque centrale à être patiente sur les taux en dépit d'une décrue du chômage à son plus bas niveau en 8 ans.

L'économie américaine a créé 151 000 nouveaux emplois le mois dernier, contre 262 000 en décembre à une époque où le marché de l'emploi avait été favorisé par un climat très doux, selon les données publiées vendredi par le département du Commerce.

Le taux de chômage, qui fait l'objet d'une enquête séparée, a néanmoins baissé d'un dixième de point à 4,9 %, son plus bas niveau depuis février 2008.

Ces chiffres ont décontenancé les analystes qui d'un côté prévoyaient davantage de nouvelles embauches (188 000), mais de l'autre s'attendaient à ce que le taux de chômage reste stable à 5 %.

«Ce rapport est déconcertant», a affirmé Michael Gapen de Barclays Research. «Ces signaux divergents ajoutés à la volatilité des marchés financiers nous amènent à réviser nos prévisions sur la trajectoire de la politique monétaire: maintenant on s'attend à deux hausses en juin et en décembre» souligne-t-il évacuant, comme de nombreux analystes, une nouvelle hausse dès la prochaine réunion monétaire des 15 et 16 mars.

Les créations d'emplois sont restées soutenues dans le commerce de détail, les cafés et restaurants et les services de santé, selon l'enquête du ministère réalisée auprès des entreprises.

Elles ont rebondi pour la première fois en un an dans le secteur manufacturier ce qui constitue une bonne nouvelle, à moins que ce ne soit une anomalie «peu crédible», estime Paul Ashworth de Capital Economics.

Mais les services aux entreprises ont généré moins d'emplois tandis que le secteur des transports a détruit des postes, notamment de nombreux emplois temporaires, sans doute affecté par la gigantesque tempête de neige qui s'est abattue sur une partie du nord-est du pays fin janvier. Le secteur minier, qui souffre toujours des bas prix de l'énergie, a encore débauché.

D'après l'autre enquête du département du Travail réalisée auprès des ménages, le taux de chômage est descendu d'un dixième de point à 4,9 %, représentant 7,8 millions de chômeurs et le taux de participation au marché du travail --qui compte ceux qui ont un emploi et ceux qui en cherchent un activement-- a très légèrement progressé à 62,7 %.

Patience de la Fed?

«Ce rapport mitigé est une raison supplémentaire pour la Réserve fédérale de ne pas bouger jusqu'au milieu de l'année en attendant de voir comment les conditions économiques évoluent», a commenté Paul Ashworth. Après sept années de taux proches de zéro, la Fed a procédé à un premier relèvement d'un quart de point à la mi-décembre.

Si le ralentissement des créations d'emplois semble refléter celui de la croissance, qui s'est établie à 0,7 % au dernier trimestre 2015 contre 2 % au trimestre précédent, le rythme d'embauche reste bien assez soutenu pour continuer de faire baisser le taux de chômage.

Mais ce qui risque d'attirer davantage l'attention de la Fed est la courbe ascendante des rémunérations. Les chiffres de janvier font enfin apparaître un rebond des salaires, avec une rémunération horaire moyenne qui a grimpé de 12 cents à 25,39 dollars, soit une hausse sur un an de 2,5 %.

La Fed surveille de près cet indicateur, car elle attend un retour de l'inflation, en général liée à l'évolution des salaires, vers un objectif à moyen terme de 2 % pour pouvoir resserrer encore davantage les taux d'intérêt.

«Cette progression des rémunérations est plus que justifiée vu que l'on approche le plein emploi», affirme Harm Bandholz d'UniCrédit Economics qui est persuadé que des hausses de taux d'intérêt interviendront cette année conformément aux intentions de la Fed.

Dans un communiqué, la Maison-Blanche a quant à elle salué la hausse des salaires tout en soulignant que si les créations d'emplois avaient ralenti «leur rythme était bien assez suffisant pour maintenir un taux de chômage bas et stable».