Les membres de la banque centrale américaine ont entamé mercredi une réunion monétaire de deux jours qui tient les marchés financiers en haleine, car la Fed n'a jamais été aussi proche en neuf ans de relever les taux d'intérêt.

La Réserve fédérale amériaine (Fed) achève jeudi une réunion de son Comité monétaire fébrilement suivie par les marchés financiers car elle pourrait déboucher sur la première hausse des taux d'intérêt en près de dix ans.

Le verdict est attendu jeudi à 14h00 à Washington. Une demi-heure plus tard, la présidente de la banque centrale Janet Yellen tiendra une conférence de presse.

Après avoir majoritairement pronostiqué que la Réserve fédérale allait relever ses taux, les économistes sont désormais bien plus partagés sur l'issue de ce Comité monétaire (FOMC).

Les récentes turbulences financières sur les marchés boursiers à la suite des inquiétudes sur le ralentissement chinois et la rechute des prix énergétiques comme des matières premières qui éteignent l'inflation ont jeté des doutes sur l'opportunité pour la Fed de renchérir le coût du crédit.

«La Fed ne va pas dégainer, craignant une réaction excessive des marchés et par inquiétude sur la Chine», la deuxième économie mondiale, affirme Claus Vistesen, de Pantheon Macroeconomics.

Pour d'autres, c'est l'économie américaine qui prime aux yeux de la Fed, dont le double mandat est de favoriser la stabilité des prix et le plein emploi.

Après tout, les États-Unis se sentent assez protégés d'un impact direct d'un ralentissement en Chine, leurs ventes vers ce pays totalisant à peine 10% de leurs exportations.

Ainsi Chris Low de FTN Financial s'attend à une hausse des taux dès jeudi.

«La croissance du PIB est assez forte pour supporter un relèvement», assure-t-il. Le taux de chômage a atteint son plus bas niveau en sept ans à 5,1%. La croissance économique devrait poursuivre son rythme soutenu même s'il n'est pas époustouflant, autour de 2,5% cette année, selon les prévisions des économistes après déjà 2,4% l'année passée.

Absence d'inflation

Seul point noir pour l'économie américaine, l'inflation est loin d'être au rendez-vous. La Fed aimerait voir une hausse des prix tourner autour de 2%, un objectif qu'elle estime sain pour l'économie.

Mais la chute des prix de l'énergie ainsi que l'appréciation du dollar compriment depuis des mois l'évolution des prix à +0,3% sur un an, selon l'indice PCE, baromètre favori de la banque centrale. La Fed ne cesse d'assurer que ces facteurs ne sont que «passagers».

Si la banque centrale décide d'une hausse des taux, celle-ci sera d'une ampleur minime, probablement dans la fourchette d'un quart de point soit 0,25%. Elle aura néanmoins une portée symbolique car elle risque d'inaugurer une nouvelle page de la politique monétaire pour la plus puissante banque centrale du monde.

C'est là que les explications de Janet Yellen sont tant attendues au cours de la conférence de presse pour qu'elle détaille le rythme d'évolution des taux par la suite. Jusqu'ici le communiqué du FOMC a toujours martelé que la politique monétaire resterait accommodante «pendant un certain temps».

Si elle franchit le pas, la Fed deviendra la seule grande banque centrale à resserrer sa politique monétaire, à contre-courant de ses consoeurs encore à la lutte pour doper la croissance.

Reflétant la grande divergence entre la croissance des États-Unis et celle plus morne du reste des pays riches, les autres grandes banques centrales font en effet le mouvement opposé.

La Banque centrale européenne (BCE) a donné en mars le coup d'envoi de son stimulus monétaire qui pourrait atteindre 1140 milliards d'euros sur un an.

Quant à la Banque du Japon, ses injections de liquidités dans le système financier visent à augmenter la base monétaire de près de 600 milliards d'euros par an.

Si la Fed prolonge au contraire le statu quo, là aussi tous les yeux seront tournés vers la patronne de l'institution pour qu'elle donne une feuille de route des prochaines étapes.

«Comme Janet Yellen est une grande partisane des indications d'orientation monétaire aux marchés, je crois qu'ils ne vont pas décider d'une hausse des taux mais donner le signal clair qu'ils le feront d'ici la fin de l'année», affirme Jia Liu, économiste auprès de l'American Institute for Economic Research (AIER).