Pas de date précise mais un cap clair: la présidente de la Banque centrale américaine Janet Yellen a appelé vendredi à une hausse des taux dès cette année, confiante dans l'économie et soucieuse d'éviter une «surchauffe».

«Si l'économie continue à s'améliorer comme je le prévois, il sera approprié à un moment donné cette année de faire les premiers pas pour relever les taux fédéraux de l'argent au jour le jour», a affirmé la dirigeante de la Fed dans un discours à Providence (Rhode Island).

Tout en restant vague, Mme Yellen apporte ainsi sa pierre - précieuse - au débat lancinant qui agite la planète finance: quand la Fed va-t-elle relever ses taux directeurs, maintenus proches de zéro depuis 2008 pour soutenir la reprise?

Pendant longtemps, les marchés, enhardis par l'embellie économique aux États-Unis, tablaient sur une hausse en juin. Mais cette hypothèse semble désormais «peu probable» après le coup de frein de l'activité au premier trimestre, selon les minutes publiées mercredi de la dernière réunion de la Fed fin avril.

La croissance américaine a calé entre janvier et mars, ralentissant à un bien pâle 0,2 % sur fond d'appréciation du dollar et de météo hivernale extrême.

«Il y a eu un certain coup de mou dans les données économiques», a reconnu Mme Yellen, ajoutant toutefois que ce «ralentissement apparent» résultait, selon elle, «en grande partie» de facteurs purement transitoires [grève des débardeurs sur la côte ouest...].

La dirigeante a, au contraire, fait part d'un certain optimisme en se félicitant que certains «vents contraires» qui freinaient l'économie [crise en zone euro, austérité budgétaire aux États-Unis...] sont en train de faiblir.

«Je m'attends à ce que les indicateurs économiques se renforcent», a-t-elle résumé, pour défendre une hausse des taux cette année alors que certains de ses collègues de la Fed appellent à plus de patience.

Prudence

La présidente de la Fed est pourtant loin d'afficher un optimisme béat et admet ainsi que les deux grands objectifs de la Réserve fédérale - plein emploi et une inflation annuelle à 2 % - ne sont pas encore atteints.

«Nous n'y sommes pas encore», a-t-elle ainsi détaillé, en référence au marché du travail. Selon elle, la décrue spectaculaire du taux de chômage aux États-Unis ne «reflète probablement pas» les faiblesses persistantes de l'emploi et notamment le fait qu'un nombre «important» d'Américains se tiennent à l'écart de la population active par manque d'opportunités.

Elle relève également que l'inflation reste encore bien en deçà de son objectif. Selon la dernière fournée de statistiques livrée vendredi, les prix à la consommation ont même baissé de 0,2 % en avril sur un an.

Mais, selon Mme Yellen, la Fed ne peut toutefois se permettre d'attendre trop longtemps pour resserrer sa politique monétaire.

«Nous devons agir en anticipant», assure-t-elle, notant que les changements dans la politique monétaire prennent du temps pour se faire sentir dans l'économie réelle.

Surtout Mme Yellen a mis en garde contre les risques de différer trop longtemps un premier relèvement des taux.

«Attendre trop longtemps jusqu'à ce que le niveau de l'emploi et de l'inflation reviennent à nos objectifs ferait courir le risque d'une surchauffe de l'économie», affirme la dirigeante.

Les faibles taux d'intérêt de la Fed ont fait considérablement baisser les coûts de l'argent, alimentant des performances record à Wall Street des prises de risques des investisseurs dont Mme Yellen s'est elle-même déjà inquiétée.

Début mai, elle avait ainsi jeté passé les investisseurs à la douche écossaise en estimant que la valorisation des marchés boursiers était «assez haute» et que cela présentait «des dangers potentiels».

Pour le plus long terme, la présidente de la Fed a répété son mantra sur les taux: leur hausse sera progressive et devra tenir compte des indicateurs économiques.

«Il faudra plus années avant que les taux de l'argent au jour le jour retrouvent leur niveau normal», a-t-elle prévenu.