Les États-Unis ont produit plus d'or noir qu'ils n'en ont importé en octobre pour la première fois en près de 20 ans, et ce, grâce au boom du pétrole de schiste. Un pas de plus vers leur objectif d'indépendance énergétique.

La production de pétrole brut des États-Unis a atteint 7,7 millions de barils par jour (mbj) en octobre, dépassant les importations pour la première fois depuis février 1995, écrit l'agence américaine d'information énergétique (EIA) dans un rapport publié mercredi.

En outre, les importations américaines de pétrole sont tombées le mois dernier au plus bas depuis février 1991, ajoute l'EIA.

La Maison-Blanche s'est aussitôt félicitée dans un communiqué de cette «étape historique vers l'indépendance énergétique».

C'est le résultat «d'une production en hausse combinée à la politique énergétique» du président américain Barack Obama, par exemple le durcissement «des normes de consommation d'essence (des véhicules) qui réduisent la consommation pétrolière, les émissions de CO2 et la facture payée par les consommateurs», a détaillé le porte-parole de la Maison-Blanche Jay Carney.

Les États-Unis regorgent de très importantes réserves d'hydrocarbures emprisonnées dans les formations rocheuses de schiste.

Depuis 2007, les progrès technologiques et l'utilisation combinée du forage à l'horizontale et de la fracturation hydraulique ont permis d'exploiter ces ressources, donnant naissance à un véritable boom énergétique.

Les États-Unis ont produit en moyenne 6,5 millions de barils de brut par jour l'an dernier et selon l'EIA ce chiffre devrait monter à 7,5 mbj cette année et à 8,5 mbj en 2014.

L'EIA fait parallèlement valoir que depuis qu'elles ont culminé en 2005, les importations de brut et de produits pétroliers n'ont cessé de chuter. Celles de brut atteignaient 7,58 mbj le mois dernier.

«Réduire notre vulnérabilité»

La crise économique avait contribué au recul de la consommation américaine, mais alors que la reprise est là et que le PIB a même fait un bond surprise au troisième trimestre à plus de 2,8%, les importations continuent à baisser.

Cette tendance devrait se poursuivre : l'EIA prévoit une chute de 28% des importations en 2014, ce qui serait leur plus faible niveau depuis 1985.

Pour Gene McGillian, analyste de la société de conseil Tradition Energy, le fait que la production américaine ait dépassé les importations était «à attendre, car la production américaine est à son niveau le plus élevé depuis des décennies».

«Cela confirme une tendance que l'on connaissait déjà», renchérit James Williams, de WTRG Economics. «Pendant quelques mois, cela pourrait s'inverser à nouveau, mais d'ici un an», la production devrait s'installer durablement au-dessus des achats de pétrole étranger, a-t-il ajouté.

Cette progression devrait venir essentiellement de «l'accélération de la production dans les bassins de schiste de Bakken, au nord des États-Unis, ou de Eagle Ford et Permian au Texas (sud)», explique l'EIA, mais l'agence gouvernementale prévoit aussi une progression dans le forage en haute mer dans le golfe du Mexique.

Par ailleurs, un rapport de l'agence internationale de l'Énergie (AIE) publié mardi affirme que les États-Unis deviendront le premier producteur mondial de pétrole dès 2015, mais ne le resteront qu'une dizaine d'années.

Pour Gene McGillian, les données du mois d'octobre «ne veulent pas dire que nous avons atteint l'indépendance énergétique, c'est prématuré», car les importations restent importantes.

Quoi qu'il en soit, la Maison-Blanche a souligné que «la hausse de l'approvisionnement énergétique américain joue un rôle d'amortisseur qui nous aide à réduire notre vulnérabilité aux perturbations de l'offre mondiale et aux chocs sur les prix».

M. Williams souligne par ailleurs que «les deux prévisions (de l'EIA et de l'AIE) pourraient se révéler fausses, car elles sont basées sur l'hypothèse de prix pétroliers qui restent élevés».

«Si le baril de brut (WTI coté à New York) tombait à 80$», contre 94$ environ mercredi, «la croissance de la production s'interromprait, car» cela reviendrait plus cher de produire sur certains gisements que d'importer, fait-il valoir.