Former davantage de diplômés universitaires. Mieux orienter les jeunes Américains dans leurs choix de carrière. Favoriser l'innovation. Subventionner la recherche et développement. Toutes des recommandations qui pourront être utiles à Barack Obama - ou à son successeur - pour accomplir une tâche de plus en plus difficile aux États-Unis: créer des emplois.

Directeur du McKinsey Global Institute, la branche de recherche économique de la firme de consultants McKinsey & Company, James Manyika a tenté de trouver des solutions au faible taux de création d'emploi aux États-Unis. Un défi herculéen mais pas impossible à surmonter. James Manyika cite notamment l'exemple de l'Allemagne. «Grâce à une série de mesures ciblées, l'Allemagne n'a pas perdu d'emploi durant la récession même si son PIB a baissé 50% plus que celui des États-Unis», dit-il.

Le plus urgent pour réduire le taux de chômage au pays de l'Oncle Sam? S'attaquer au déséquilibre entre la formation des chômeurs et les emplois disponibles. Actuellement, 64% des entreprises ne peuvent recruter, faute de candidats qualifiés, selon un sondage de McKinsey. Si le pays veut atteindre le plein emploi (taux de chômage de 5%) en 2020, il faudra 21 millions de nouveaux emplois. Au rythme actuel, il manquera 1,5 million de bacheliers universitaires.

Parmi les pistes de solution proposées par McKinsey: créer une base de données nationale sur les emplois les plus demandés et un programme fédéral de bourses d'études pour combler ces emplois. Car il ne faut plus compter sur le secteur privé pour former ses recrues. «Avant, vous formiez un employé pour une longue période de temps, mais les gens ne travaillent plus aussi longtemps au même endroit, dit James Manyika, l'un des six signataires du rapport du McKinsey Global Institute. Il n'y a qu'au sein de l'Armée que l'on reçoit une formation tout en étant payé.»

En plus d'être parfois sous-qualifiée, la main-d'oeuvre américaine a trop souvent les deux pieds dans le ciment. «La soi-disant flexibilité de la main-d'oeuvre américaine est un mythe, dit James Manyika. En 1985, un Américain sur cinq déménageait chaque année. Maintenant, c'est une personne sur dix. Avec la hausse des hypothèques et le fait que les deux conjoints travaillent pour payer la maison, c'est plus difficile pour une famille de déménager pour un emploi. Ça fait mal à l'économie.»

Les multinationales sont aussi de moins en moins enclines à fournir du travail aux États-Unis. «Les États-Unis sont toujours attrayants pour une multinationale, mais c'est beaucoup plus concurrentiel, dit James Manyika. Les recherches suggèrent que ces entreprises prennent quatre facteurs en considération quand elles créent des emplois: l'environnement macroéconomique, la possibilité de recruter des travailleurs qualifiés, la qualité des infrastructures du pays et le climat d'affaires. À court terme, le gouvernement fédéral américain a un contrôle direct sur un seul de ces quatre critères: le climat d'affaires. De meilleurs incitatifs fiscaux pourraient encourager les multinationales à investir davantage aux États-Unis.»

Selon l'économiste Enrico Moretti, la Maison-Blanche doit aussi miser sur l'industrie de l'innovation, notamment en réformant son système de subventions à la recherche et au développement. «Les États-Unis n'y investissent pas assez», dit le professeur d'économie de l'Université Berkeley en Californie.

Peu importe les décisions prises par l'administration Obama pour stimuler l'emploi, c'est probablement son successeur - en 2012 ou en 2016 s'il est réélu - qui en bénéficiera le plus. «C'est de la pensée magique de croire qu'un gouvernement peut changer les cycles économiques qui ont leur propre dynamique, dit le professeur Enrico Moretti. Leurs décisions ont rarement un grand impact à court terme. Il faut plutôt voir à long terme.»