Même dans la mort, Oussama ben Laden continuera pendant des années de se venger des contribuables américains.

Déjà, le gouvernement américain a dépensé 2 mille milliards US pour combattre l'ancien chef d'Al-Qaïda, soit plus de 20% de la dette publique des États-Unis, qui s'élève à 9,68 mille milliards US. Cet argent a servi à payer les guerres en Afghanistan et en Irak et il représente aussi les dépenses supplémentaires pour l'armée, le renseignement et la sécurité du territoire, dépenses supérieures aux tendances observées avant le 11 septembre 2001, indique une analyse de Bloomberg.

Cette année uniquement, les contribuables américains dépensent plus de 45 milliards US en intérêts sur les sommes empruntées pour combattre Al-Qaïda, précise l'analyse.

Et cette saignée financière ne s'arrêtera pas avec la mort de ben Laden. Pas moins de 25% du déficit que les États-Unis s'attendent à subir dans l'exercice qui commencera le 1er octobre prochain seront la conséquence des 285 milliards US en dépenses annuelles provoquées par le riche terroriste issue d'une famille saoudienne.

«Sans ben Laden, nous aurions accumulé moins de dettes, nous dépenserions moins en intérêts et nos dépenses seraient plus modestes dans le futur», estime Dean Baker, codirecteur du Center for Economic and Policy Research, organisation établie à Washington.

En plus de ces ravages financiers, ben Laden a laissé une empreinte moins quantifiable sur la vie américaine. Des milliers de familles ont souffert de douloureuses pertes en raison des attaques du 11 septembre 2001 et des deux guerres. Des édifices gouvernementaux à Washington et dans d'autres parties du monde ressemblent désormais à des bunkers. Et l'on a tiré une nouvelle ligne entre le pouvoir gouvernemental et la liberté individuelle, tandis que des organes du pouvoir ont disposé de nouveaux moyens pour combattre une menace inédite.

La facture totale héritée de ben Laden pourrait être plus lourde que ne l'indique l'analyse de Bloomberg. Selon Mark Zandi, économiste en chef de Moody's Analytics Inc., ben Laden a coûté aux entreprises et au gouvernement américains 2,5 mille milliards US, soit 250 milliards US chaque année. «Je crois qu'un planificateur prudent, ajoute-t-il, s'attendrait à ce que ces coûts continuent à l'infini dans le futur.»

En fait, le compteur ne s'est pas arrêté le 2 mai dernier lorsque le cadavre de ben Laden a glissé dans la mer d'Oman. Pour la seule année 2012, les États-Unis prévoient consacrer 118 milliards US de plus aux opérations militaires en Afghanistan et en Irak. Les dépenses fiscales additionnelles en 2012 qui peuvent être attribuées à ben Laden comprennent un supplément de 14 milliards US pour la sécurité du territoire, environ 125 milliards US pour le Pentagone en excluant les deux guerres, un accroissement des dépenses pour le renseignement et une hausse de l'aide au Pakistan, selon l'analyse de Bloomberg.

Les dépenses futures que devront engager les États-Unis et qui peuvent être attribuées à ben Laden dépassent de beaucoup les coûts directs de la guerre. Gordon Adams, responsable du budget pour la sécurité nationale sous l'administration Clinton, estime qu'environ 125 milliards US du budget de 553 milliards US pour 2012 requis par le Pentagone représentent des dépenses inutiles justifiées pour répondre à des besoins de temps de guerre.

«C'est une taxe qui n'aurait pas existé sans ben Laden», affirme M. Adams, professeur à la School of International Service de l'American University.

Au cours de la décennie après les attaques du 11 septembre 2011, les États-Unis ont ajouté 92 000 soldats à leur force terrestre. Chaque tranche de 10 000 personnes ajoutée à l'effectif militaire signifie des dépenses annuelles supplémentaires de 1 milliard US, selon M. Adams. Ainsi, l'augmentation de l'effectif de la force terrestre américaine inspirée par ben Laden impose des coûts additionnels de 9 milliards US chaque année, précise le professeur Adams.