Le président américain Barack Obama, qui prononce ce soir un discours sur l'état de l'Union axé sur l'emploi, pourra compter sur environ quatre millions de nouveaux emplois quand il se présentera devant son électorat en novembre 2012.

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Est-ce suffisant pour faire oublier aux électeurs la faiblesse de la reprise économique américaine? Seul le temps le dira.

Mais le président Obama, qui vient de nommer le PDG de GE, Jeff Immelt, à la tête du Conseil sur l'emploi et la compétitivité, traînera assurément son principal boulet - l'économie - jusqu'au prochain scrutin.

Mince consolation, le boulet deviendra graduellement moins lourd.

«Le taux de chômage restera encore très élevé, mais ça va être quand même moins difficile que les deux dernières années, dit Francis Généreux, économiste au Mouvement Desjardins. Il ne peut pas avoir un pire climat économique qu'à son entrée à la Maison-Blanche.»

Le Mouvement Desjardins prévoit que le taux de chômage aux États-Unis, chiffré à 9,4% le mois dernier, diminuera à 8,8% dans un an et à 8,2% en novembre 2012 pour le scrutin présidentiel. La Banque Nationale (8,7% dans un an et 8,1% en novembre 2012) et la Banque Laurentienne (8,5% d'ici un an et 8,2% en novembre 2012) ont des prévisions similaires. En clair, le président Obama, qui n'a pu compter que sur un million de nouveaux emplois depuis son entrée à la Maison-Blanche il y a deux ans, peut espérer environ quatre millions de nouveaux emplois d'ici novembre 2012.

Tous ces nouveaux emplois ne permettront toutefois pas à l'économie américaine de rattraper l'écart par rapport aux années de forte croissance économique durant le deuxième mandat de l'administration Bush.«Quelque 146 millions d'Américains avaient un emploi avant la crise financière et la récession, mais ce nombre est tombé à 138 millions à la fin de l'année 2008», dit Stéfane Marion, économiste en chef à la Banque Nationale.

En dépit des prévisions encourageantes pour le marché de l'emploi, l'administration Obama ne doit pas crier victoire trop rapidement.«Le taux d'emploi à temps partiel n'a jamais été aussi élevé. Moins d'un Américain sur deux (46%) a un emploi à temps plein. On n'avait pas atteint un plancher aussi bas depuis 1982», dit Sébastien Lavoie, économiste en chef adjoint de la Banque Laurentienne.

«La cadence de création d'emplois va être plus grande à partir de maintenant, mais les gens doivent réaliser que ça va prendre du temps, dit Stéfane Marion. Une économie comme celle des États-Unis ne peut pas se virer de bord sur un 10 cents. Les deux tiers des emplois perdus durant la récession ont été dans la construction et le manufacturier, deux secteurs où il est difficile de se recycler pour les travailleurs.»

Le champ d'action du président américain en matière de création d'emplois est aussi limité, selon l'économiste Sébastien Lavoie.«Obama n'a plus d'options pour créer des emplois, dit-il. En plus, il va devoir parler davantage de déficit et de dette au cours de la prochaine année.»

Favoriser la création d'emplois et réduire le déficit (estimé à 1300 milliards US en 2011): voilà deux objectifs économiques aux antipodes. C'est pourtant une grande partie de la stratégie économique du président Obama, qu'il précisera ce soir dans son discours de l'État de l'Union.«Ce sera un bon discours, mais je ne m'attends pas à beaucoup d'actions concrètes, dit Sébastien Lavoie. Il ne peut pas initier un plan de relance et il doit surveiller la dette.»

Pour favoriser la création d'emplois, Sébastien Lavoie regarde du côté d'un orateur moins spectaculaire que le président américain mais doté de pouvoirs tout aussi puissants dans les circonstances: Ben Bernanke, président de la Réserve fédérale (Fed).

L'économiste de la Banque Laurentienne pense que la Fed, qui a promis d'acheter 600 milliards US en obligations entre novembre et juin, n'aura d'autre choix que de prolonger son programme d'achat visant notamment à stimuler l'économie. De tels achats de masse font généralement diminuer les taux d'intérêt, ce qui relance le crédit aux entreprises, stimule les exportations et finit par créer de nouveaux emplois.«La création d'emplois sera plus liée à Bernanke qu'à Obama», dit Sébastien Lavoie.