Lorsque s'exprime le président de la Réserve fédérale américaine Ben S. Bernanke, c'est comme si ses propos étaient interprétés comme parole d'évangile par les intervenants des marchés.

Vendredi, des chiffres très décevants sur l'état de santé du marché du travail (39 000 nouveaux emplois seulement et hausse de 9,6% à 9,8% du taux de chômage) n'ont pas freiné l'élan des investisseurs. Ils ont déplacé une partie de leurs billes sur le marché obligataire vers celui des actions.

Le rendement des obligations américaines venant à échéance en 2020 est alors monté jusqu'à 3,04%, son taux le plus élevé depuis le 28 juillet, selon les données de Bloomberg.

Dans une entrevue télévisée présentée dimanche, M. Bernanke n'a pas écarté la possibilité d'imprimer davantage d'argent que les 600 milliards US déjà annoncés par la Fed. «Tout dépendra de l'efficacité du programme en cours», a-t-il dit. L'efficacité étant mesurée à l'auge du double mandat de la Fed qui doit assurer la stabilité des prix et favoriser le plein emploi.

Comme la Fed l'avait précisé dans la publication du procès-verbal de sa réunion du 3 novembre, il faudra plusieurs années pour ramener le taux de chômage à un niveau jugé normal de 5% ou 6%, a aussi indiqué M. Bernanke.

Faute de nouvelles statistiques à se mettre sous la dent, les investisseurs ont choisi de revenir sur le marché obligataire hier, spéculant quelque peu sur une extension de la détente quantitative. Le rendement des obligations de 10 ans est repassé sous la barre de 3% et est descendu jusqu'à 2,94%. «En franchissant le seuil technique de 2,96%, il pourrait tester la barre des 2,85%», indique Michel Doucet, vice-président, gestion de portefeuille, chez Valeurs mobilières Desjardins.

Comme il faudra quelques mois pour qu'une tendance nette se dessine sur le marché du travail américain qui ne s'améliore que trop lentement, le taux sur les obligations américaines de 10 ans devrait osciller dans une fourchette de 2,90% à 3,05% d'ici la fin de l'année, croit cependant M. Doucet.

Paul-André Pinsonnault, économiste principal à la Banque Nationale, croit aussi que l'évolution du marché du travail sera déterminante.

Il constate que le taux sur les obligations de 10 ans a augmenté depuis l'annonce de l'injection des 600 milliards US, au début de novembre. Le 11 novembre, il était de 2,60%. «À partir de la fin d'août, les indicateurs économiques ont été meilleurs que les attentes», explique-t-il, ce qui a amené certains commentateurs à penser que l'injection pourrait être moindre.

Il s'attend néanmoins à un taux plus près de 2,80% en fin d'année. Comme l'économie va se renforcer en 2011, il croit que le taux des 10 ans va grimper lentement en 2001 jusqu'à 3,83%.

Demain, les États-Unis mettront à l'encan 21 milliards US de nouvelle dette venant à échéance en 2020 dans l'une des trois séances d'adjudication totalisant 66 milliards US. Le degré d'engouement des investisseurs, alors que semblent s'aggraver les tensions sur la dette souveraine de quelques pays de la zone euro, va aussi influencer les taux obligataires au cours des prochains jours.