Créer des emplois - voilà un lointain souvenir pour les Américains.

Même sortis de la récession, nos voisins du Sud continuent de perdre des emplois - environ 20 000 en février dans le secteur privé. La disette de 25 mois pourrait bien se terminer ce mois-ci.

Le département du Travail publiera demain les chiffres officiels du marché de l'emploi pour février, mais un rapport de la firme ADP publié hier conclut à des pertes de 20 000 emplois dans le secteur privé en février, en excluant les emplois agricoles. Mince consolation: les pertes d'emploi sont trois fois moins importantes que celles du mois précédent. En plus, l'économie du nord-est du pays a tourné au ralenti durant plusieurs jours en raison des fortes tempêtes de neige. «Les tempêtes ont affecté le secteur de la construction et du commerce de détail, dit Sébastien Lavoie, économiste à la Banque Laurentienne. À titre d'exemple, Ford a haussé ses ventes dans tous les États américains en février sauf ceux du Nord-Est.»

Même si l'économie américaine perd des emplois chaque mois depuis le début de la récession en janvier 2008, Sébastien Lavoie prévoit une création nette de 100 000 emplois en mars. Son collègue au Mouvement Desjardins, Francis Généreux, parle plutôt d'un gain net de 80 000 emplois.

Comment les États-Unis créeront-ils des dizaines de milliers d'emplois ce mois-ci? En comptant leur population. À chaque décennie, le gouvernement américain doit faire un recensement. Cette année, l'opération nécessitera l'embauche de 1,2 million d'Américains, la plupart pour une période variant entre six et huit semaines. «Ça ne pouvait pas mieux tomber en ce qui concerne l'emploi», dit Sébastien Lavoie

Selon le Mouvement Desjardins, le recensement donnera un répit mérité au marché de l'emploi, mais un répit à bien court terme. «Les emplois du recensement ne sont pas des emplois à long terme, dit l'économiste Francis Généreux. Les emplois créés au printemps vont être perdus à nouveau au cours de l'été. La véritable tendance à regarder, c'est celle dans le secteur privé.»

Le taux de chômage, qui se situait à 5% au début de la récession en janvier 2008, était de 9,7% en janvier dernier. Selon Francis Généreux, l'administration Obama pourra difficilement se servir de l'embellie anticipée pour l'emploi ce printemps comme argument politique aux élections au Congrès en novembre. «L'effet des emplois sera nul en vue des élections législatives en novembre, dit l'économiste au Mouvement Desjardins. Obama pourra dire que les démocrates sont parvenus à stopper les pertes d'emplois, mais il s'est perdu 8,4 millions d'emplois depuis le début de la récession. C'est énorme. En plus, les gens qui ont perdu leur emploi sont longtemps au chômage. La moyenne est de 30,2 semaines actuellement, comparativement à environ 20 semaines lors de la dernière récession en 2001.»

Selon la firme ADP, le marché de l'emploi se porte mieux dans le secteur des services ("17 000 emplois dans le secteur privé en février) que dans le secteur des biens (-37 000). L'indice d'activité du secteur des services ISM s'est apprécié de 44,6 à 48,6 entre janvier et février.

La Réserve fédérale américaine est aussi relativement optimiste pour les chômeurs. Dans son livre beige publié hier, la Fed indique que l'économie américaine a commencé à aller du mieux au cours des dernières semaines même si une partie du pays a été secouée par de fortes tempêtes de neige. L'économie de la région de Washington, du Maryland, de la Virginie et des deux Carolines a été la plus affectée par les tempêtes.

La Réserve fédérale a aussi noté que l'accès au crédit restait difficile dans la plupart des 12 districts financiers du pays. «Les banques restent prudentes avant de prêter.»