Un optimisme prudent gagne Washington grâce à la multiplication d'indices d'une reprise qui se met en place.

«Il reste bien du chemin à parcourir, mais nous commençons à voir des signes de stabilité qui marquent les premiers pas de la reprise», a affirmé hier le secrétaire au Trésor Timothy Geithner au cours d'une allocution en Ohio.

Comme pour lui donner raison, l'indicateur avancé du Conference Board a progressé pour le quatrième mois d'affilée en juillet tandis que la production industrielle était à la hausse pour la première fois en plus d'un an dans les districts de Philadelphie et de New York. Cela suggère que les livraisons manufacturières et les nouvelles commandes sont vraisemblablement à la hausse ce mois-ci. Si la chose se confirme dans les prochains jours, il s'agira de la première expansion du secteur manufacturier américain depuis janvier 2008.

Ce revirement est tangible aussi de ce côté-ci de la frontière. Les ventes des grossistes canadiens ont progressé en juin pour la première fois depuis septembre tandis que leurs stocks ont diminué pour le quatrième mois d'affilée.

Le gros de l'amélioration de la production américaine est d'ailleurs attribuable au restockage des entreprises. Les grossistes canadiens sont de bons fournisseurs.

Du côté de l'indicateur avancé, la donnée la plus encourageante portait sur l'augmentation légère du nombre moyen d'heures travaillées le mois dernier. «Cela suggère que les employeurs les augmentent pour répondre à une lente amélioration de la demande», déduit Charmaine Buskas, économiste principal chez valeurs mobilières TD.

«Bref, la peur généralisée cède le pas à de la confiance en émergence», a résumé le trésorier Geithner dans son discours.

Chez Goldman Sachs, on va même un peu plus loin, bien qu'avec précaution. «Juin paraît maintenant le meilleur candidat pour marquer le creux de la récession selon le NBER», affirme son économiste Ed McKelvey dans une lettre à la clientèle.

Le National Bureau of Economic Research (NBER) définit une récession non pas comme deux trimestres de décroissance d'affilée, comme le font la plupart des économistes. Elle est plutôt marquée par «un déclin significatif et répandu de l'activité économique, qui s'étend durant plusieurs mois qui se manifeste normalement dans le produit intérieur brut réel, le revenu réel, l'emploi, la production industrielle et dans le commerce de gros et de détail».

Selon cette définition très qualitative, le NBER a décrété que la récession américaine avait commencé en décembre 2007. Il faudra attendre beaucoup de mois (sans doute plus d'un an) avant qu'il ne décrète sa fin. L'analyse de chacun des critères par M. McKelvey l'amène à croire que juin paraît le point tournant. Il émet deux réserves: la révision à la baisse de données publiées et la possibilité d'un faux départ.

Méfiance

Plusieurs économistes se méfient surtout de la deuxième hypothèse, comme en fait foi la hausse inattendue des demandes initiales d'assurance chômage la semaine dernière, après plusieurs semaines de repli.

«Avant de conclure à la fin de la récession, il faudra s'assurer qu'un ressac n'aura pas lieu au cours des prochains mois, prévient Francis Généreux, économiste principal chez Desjardins. La poursuite des pertes d'emplois, la baisse des ventes au détail ainsi que de la confiance des consommateurs et les fluctuations amenées par certaines politiques gouvernementales laissent la porte ouverte à ce sujet.»

- Avec Bloomberg