Hydro-Québec a décidé «d'ouvrir les vannes» en proposant six options au Massachusetts dans l'espoir de décrocher un contrat d'approvisionnement d'une durée de 20 ans qui pourrait générer des centaines de millions de dollars en revenus.

Sa proposition déposée jeudi porte sur au moins 8,3 des 9,45 térawattheures d'électricité que cet État de la Nouvelle-Angleterre - qui consomme chaque année environ 60 térawattheures - souhaite acheter annuellement à compter de 2022.

L'appel d'offres du Massachusetts découle d'une loi adoptée en 2016 qui oblige les sociétés énergétiques à se procurer 9,45 térawattheures d'énergie renouvelable ainsi que jusqu'à 1600 mégawatts d'énergie éolienne produite en mer.

«Hydro-Québec fait partie de la solution, estime le vice-président au développement des affaires de la société d'État, Steve Demers. Nous ne sommes pas la seule solution, mais notre stratégie vient ajouter de la valeur.»

Pour l'instant, Hydro-Québec ne s'avance pas sur les revenus générés par l'obtention d'un éventuel contrat. La société d'État convient qu'une entente avec le Massachusetts serait au coeur de sa stratégie visant à doubler son chiffre d'affaires d'ici 2030.

En 2016, 24,1 des 32,6 térawattheures exportés annuellement par Hydro-Québec étaient destinés au marché américain.

La société d'État propose trois lignes de transport afin d'acheminer l'électricité au Massachusetts, soit par des interconnexions situées au Vermont, au Maine ainsi qu'au New Hampshire avec le Northern Pass. Ce projet, dont la mise en service est prévue en 2019, a fait l'objet de critiques des deux côtés de la frontière.

Pour les trois scénarios, Hydro-Québec propose une option d'approvisionnement uniquement avec de l'hydroélectricité ainsi qu'une combinaison d'hydroélectricité et d'énergie éolienne.

Advenant que le Massachusetts choisisse la deuxième option, Gaz Métro et Boralex (TSX:BLX) ajouteraient une quatrième phase de 300 mégawatts aux parcs éoliens de la Seigneurie de Beaupré dans le cadre d'un investissement qui pourrait atteindre 700 millions.

«Notre pari, c'est que le produit éolien que l'on offre est exactement ce qui est recherché au Massachusetts, explique le directeur du développement chez Boralex, Rafael Bourrelis. L'hydroélectricité permet de stabiliser la production et l'éolien apporte une valeur environnementale supplémentaire.»

Des trois lignes de transport, le projet du Northern Pass, développé avec la compagnie américaine Eversource, est le plus avancé. Hydro-Québec a toutefois entrepris en avril des études préliminaires pour les options du Maine et du Vermont.

Advenant que le tracé du Northern Pass ne soit pas celui retenu, cette décision ne compromettrait pas l'avenir de ce projet, dont la construction n'a pas encore débuté, assure M. Demers. L'aménagement de cette ligne de transport est évalué à près de 620 millions pour la partie québécoise, alors qu'au sud de la frontière, ce montant grimpe à 2,1 milliards.

Plusieurs joueurs

Le Massachusetts, qui souhaitait stimuler la concurrence avec son appel de propositions lancé le 31 mars, a atteint son objectif. Pas moins de 18 joueurs avaient signifié leur intérêt afin de déposer une offre.

Avec cette démarche, l'État américain souhaite réduire ses coûts énergétiques, sécuriser ses approvisionnements et se donner les moyens d'atteindre ses cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre.

«L'appel de propositions est ancré dans une loi du Massachusetts, souligne M. Demers. C'est un processus robuste, complet et qui doit produire des résultats.»

Le Massachusetts devrait faire part de sa décision dès le début de 2018. Hydro-Québec croit être en mesure de se démarquer étant donné qu'elle peut assurer un approvisionnement continu ainsi que de l'énergie propre.

«Nos propositions ne représentent pas la totalité de ce que le Massachusetts doit contracter, explique le vice-président au développement des affaires de la société d'État. L'État peut choisir plus d'un joueur.»

Bien qu'elle soit confiante, Hydro-Québec ne tient rien pour acquis, rappelant que la concurrence est féroce.

Selon Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l'énergie à HEC Montréal, la société d'État a réellement des chances, étant donné qu'elle peut offrir des prix raisonnables en plus de garantir des livraisons.

«Pour plusieurs (qui misent sur l'éolien), la difficulté se trouve là, dit-il. On ne peut garantir les livraisons à des heures fixes.»

L'an dernier, les exportations ont représenté 803 millions du bénéfice net de 2,86 milliards généré par la société d'État. La Nouvelle-Angleterre représente la moitié de son marché d'exportation, contre 25% pour l'État de New York.