Le cinquième conflit sur le bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis a officiellement débuté.

Au terme d'une enquête du département américain du Commerce, l'administration Trump doit annoncer mardi un droit compensatoire moyen de 19,88 pour cent sur les exportations canadiennes vers le sud de la frontière. Ce taux risque de grimper étant donné qu'une décision sur les droits antidumping est attendue le 23 juin.

Voici un résumé de cette querelle commerciale entre les deux pays.

Le portrait

L'accord de 2006 entre le Canada et les États-Unis sur le bois d'oeuvre s'était conclu après cinq ans de batailles devant les tribunaux. Le Canada avait poursuivi les États-Unis devant l'Organisation mondiale du commerce qui lui avait donné raison. L'entente commerciale est venue à échéance en octobre 2015, mais les autorités américaines ne pouvaient imposer de tarifs punitifs immédiatement en raison d'une période de grâce de 12 mois suivant l'échéance de l'entente.

L'industrie américaine du bois d'oeuvre avait déposé sa requête judiciaire pour concurrence déloyale et dumping contre l'industrie canadienne en novembre 2016, pavant ainsi la voie à l'enquête du département américain du Commerce.

La source de discorde

L'industrie américaine du bois d'oeuvre - qui veut protéger ses parts de marché - accuse une fois de plus le Canada de subventionner injustement les entreprises d'ici par l'entremise de droits de coupes trop bas. Les provinces et le gouvernement fédéral estiment que cet argument ne tient pas la route et que le bois canadien devrait être exempté des quotas et tarifs douaniers puisque les régimes forestiers provinciaux - dont celui du Québec - répondent aux exigences américaines en matière de libre-échange.

Jusqu'à présent, le Québec s'est engagé à mettre sur pied un programme de garanties de prêt pour les entreprises forestières touchées. La réponse du gouvernement Trudeau se fait toujours attendre.

Une querelle qui a de l'âge

Le bois d'oeuvre est source de discorde entre les deux voisins depuis plus de trois décennies. À quatre reprises dans les années 1980, 1990 et 2000, les États-Unis ont imposé des droits compensatoires sur le bois d'oeuvre canadien. Le dernier conflit commercial remonte à 2001, lorsque les Américains avaient alors imposé des droits compensatoires de 27,22 pour cent sur le bois d'oeuvre et des droits antidumping oscillant entre 2 et 16 pour cent selon les entreprises visées.

Une situation différente cette fois-ci

D'après des observateurs, l'industrie canadienne du bois d'oeuvre est dans une meilleure position qu'elle ne l'était il y a 10 ans pour traverser un conflit commercial avec les États-Unis, mais les plus petits producteurs du Québec et de l'Ontario seraient particulièrement vulnérables. Les producteurs de la Colombie-Britannique comme West Fraser Timber, Canfor et Interfor ont usé de précautions en achetant des scieries aux États-Unis en plus d'augmenter leurs exportations de bois d'oeuvre vers la Chine.

Toutefois, l'éloignement géographique des scieries de l'Ontario et du Québec avec la Chine les empêche de livrer leur produit dans la plus grande économie de l'Asie. D'après Statistique Canada, la valeur des exportations canadiennes de bois d'oeuvre vers ce pays est passée de 55 millions $ en 2005 à 1 milliard $ l'an dernier.

De plus, dans le centre du Canada, les scieries ont tendance à être plus petites, leurs flux de trésorerie sont moins importants pour régler les droits et, conséquemment, le risque de fermeture est plus élevé, ont noté des experts.

Le poids de l'industrie forestière au Québec

Au Québec, dans son ensemble, ce secteur compte quelque 60 000 emplois directs en plus de représenter 11,7 pour cent des exportations totales de la province. Selon le département américain du Commerce, les exportations canadiennes de bois d'oeuvre à destination des États-Unis ont totalisé 4,7 milliards $ US en 2016. La part du Canada sur le marché américain, qui se situe historiquement entre 30 et 34 pour cent, devrait reculer à 25 pour cent d'ici 2027 en raison d'une infestation de dendroctone du pin en Colombie-Britannique et d'une diminution des récoltes au Québec.