Environ un an après avoir pris ses distances du projet de mine d'apatite à ciel ouvert à Sept-Îles, l'unique partenaire du gouvernement Couillard a décidé de changer son fusil d'épaule.

Le producteur de fertilisants norvégien Yara a annoncé mardi qu'il se réengageait afin de poursuivre les études de faisabilité du projet Mine Arnaud dont la facture est actuellement estimée à 850 millions $.

Selon Investissement Québec (IQ), cela s'explique en grande partie par le rachat des actifs ferroviaires et portuaires de Pointe-Noire effectué en début d'année par le gouvernement québécois.

«Yara était intéressée parce que cela fait en sorte que le taux de rendement du projet sera plus élevé», a expliqué une porte-parole d'IQ, Chantal Corbeil, au cours d'un entretien téléphonique.

En plus d'une réduction des dépenses d'exploitation, le rachat de ces actifs devrait se traduire par une diminution «substantielle» des coûts du projet, qui seront confirmés par la poursuite des études de faisabilité.

En octobre 2015, la multinationale norvégienne avait signifié à IQ qu'elle ne souhaitait plus investir dans le plus important projet de mine à ciel ouvert au Québec, mais demeurait intéressée à acheter entre 40 et 50 % de la production de 1,3 million de tonnes de concentré d'apatite - un minerai utilisé dans la fabrication d'engrais agricole.

Investissement Québec - qui souhaite attirer deux ou trois partenaires supplémentaires - détient une participation de 62 % dans le projet, comparativement à 38 % pour Yara. L'État québécois a jusqu'ici allongé 25 millions $, comparativement à 15 millions $ pour la multinationale norvégienne.

«Nous avons (retenu les services) d'une firme internationale afin de nous aider à identifier d'autres investisseurs, a souligné Mme Corbeil. Le retour de Yara aidera certainement à en attirer d'autres.»

Ce controversé projet avait obtenu un certificat d'autorisation assorti de 11 conditions de la part du gouvernement québécois en mars 2015 dans le cadre d'une annonce effectuée à Sept-Îles.

On prévoyait la création d'environ 1000 emplois durant la phase de construction et d'aménagement de routes qui devait commencer cette année. Cela a toutefois été reporté à l'an prochain. Quelque 300 personnes devraient travailler à la mine lors de l'exploitation, qui doit s'étaler sur une vingtaine d'années.

Les préoccupations entourant les impacts environnementaux ont divisé la population de la municipalité, puisque le milieu des affaires et les syndicats vantent la création d'emplois, alors que les écologistes et des groupes citoyens s'inquiètent de la qualité de l'air et de l'eau.

Le maire de Sept-Îles, Réjean Porlier, qui a appris la nouvelle par l'entremise des médias, s'est montré prudent, affirmant qu'il préférait commenter une fois que le projet de mine à ciel ouvert franchira une étape concrète.

«Je n'ai jamais fait de cachettes, j'ai des préoccupations à l'égard de tout cela, a-t-il dit au cours d'un entretien téléphonique. Cela fait trois ou quatre fois qu'il y a une annonce. Quand il y en aura une concrète, on pourra mieux évaluer le projet.»

La viabilité de Mine Arnaud a été remise en question à plusieurs reprises, notamment parce que l'offre est abondante sur le marché du phosphate, qui se retrouve dans l'apatite, causant une pression à la baisse sur les prix.

D'après les analyses de la Banque mondiale, le prix de la tonne de phosphate pourrait glisser de 118 $ à 110 $ entre 2017 et 2025, alors que le seul de rentabilité du projet à Sept-Îles oscillerait autour de 120 $.