Le gouvernement Trudeau demande à l'administration Obama de remplacer les quotas et les taxes sur le bois d'oeuvre canadien par un régime de libre-échange dans le prochain accord canado-américain négocié actuellement entre les deux pays, a indiqué le ministre des Affaires étrangères du Canada, Stéphane Dion, au cours d'une entrevue à La Presse.

« On demande aux Américains de laisser rentrer notre bois d'oeuvre », a dit le ministre Dion à La Presse, à quelques jours du dîner d'État à la Maison-Blanche donné jeudi en l'honneur du premier ministre canadien Justin Trudeau. « On ne voit pas, en effet, pourquoi il y aurait des restrictions puisque de toute façon, les doléances des Américains à notre endroit ont toujours été considérées comme non fondées par les cours. [...] »

« On a signé une entente de libre-échange, ça doit s'appliquer au bois d'oeuvre. On verra bien le résultat des négociations, mais c'est certainement notre position [d'avoir un régime de libre-échange]. » - Stéphane Dion, ministre des Affaires étrangères du Canada

Mais qui dit négociations dit concessions. Si Ottawa ne peut convaincre Washington d'instaurer un régime de libre-échange, le dernier accord de 2006-2015 pourrait servir de base de négociations. « On veut au moins le renouvellement de l'entente de la dernière fois, sinon encore mieux », a dit le ministre Dion.

Comment l'administration Obama accueille-t-elle les propositions du Canada à la table des négociations ? « Ils nous écoutent et on espère que les négociations vont bien aller », a indiqué M. Dion.

ET LE QUÉBEC ?

Au Québec, l'industrie forestière demande au gouvernement Trudeau de négocier un régime de libre-échange complet avec les Américains, notamment parce qu'un nouveau régime forestier plus concurrentiel (basé notamment sur des enchères dans les forêts publiques) est entré en vigueur en 2013. Ottawa n'avait pas indiqué publiquement s'il soutenait la demande d'un régime de libre-échange formulée par l'industrie forestière.

En entrevue vendredi dernier, la ministre du Commerce international, Chrystia Freeland, disait « comprendre très bien » la position de l'industrie québécoise, mais elle ne s'était pas prononcée à savoir si son gouvernement la partageait.

« Notre devoir, c'est de chercher une résolution qui sera bonne pour tout le Canada. » - Chrystia Freeland, ministre du Commerce international

Questionné hier sur la position du gouvernement par l'opposition à la Chambre des communes, le secrétaire parlementaire au Commerce international, David Lametti, a répondu que le gouvernement souhaitait un « accès stable, juste et équitable au marché américain » pour le bois d'oeuvre, sans parler de libre-échange.

Le ministre Dion est plus catégorique : le Canada demande un régime de libre-échange pour le bois d'oeuvre. « À chaque fois qu'on va pour un litige, on gagne, dit-il. Puisqu'on a le droit international pour nous, on demande aux Américains de faire en sorte que la libre concurrence s'exerce dans ce domaine-là comme dans tous les autres », a dit le ministre Dion, soulignant « l'énergie » et la « détermination » de la ministre Freeland dans ce dossier.

Le dernier accord sur le bois d'oeuvre, en vigueur de 2006 à 2015, a pris fin en octobre dernier, mais il prévoyait une année supplémentaire de libre-échange avant de pouvoir recourir aux tribunaux commerciaux (en octobre 2016).

Ottawa convient qu'il est trop tôt pour en arriver à une entente d'ici la visite d'État, mais ce dossier devrait faire partie des discussions jeudi à la Maison-Blanche. « On ne va pas rater l'occasion pour faire valoir aux Américains encore une fois qu'il est dans leur intérêt de laisser rentrer le bois canadien puisqu'il est moins cher et d'excellente qualité », a précisé Stéphane Dion.