Les cours du pétrole ont nettement monté jeudi, poursuivant leur hausse du début de semaine, dans l'idée d'un accord entre Moscou et l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) pour baisser leur production, même si beaucoup d'observateurs restaient sceptiques.

Le cours du baril de «light sweet crude» (WTI) pour livraison en mars a pris 92 cents à 33,22 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), après avoir gagné quelque deux dollars lors des deux précédentes séances.

À Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison à même échéance a avancé de 79 cents à 33,89 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), ralentissement toutefois nettement après avoir dépassé les 35 dollars.

«Je pense que tout se résume à ces gros titres selon lesquels un accord se prépare entre la Russie et l'Arabie saoudite et pourrait les conduire à réduire de 5% leur production», a mis en avant Bart Melek, de TD Securities. «Cela conduirait à un déficit de pétrole sur le marché au second semestre.»

Alors que le marché avait récemment chuté au plus bas depuis 2003 face à l'absence de lueur d'espoir quant à la surabondance actuelle, la Russie a annoncé jeudi, par la voix de son ministre de l'Énergie, être prête à discuter avec l'OPEP d'une possible baisse de production, évoquant explicitement ce chiffre de 5%.

Le ministre, Alexander Novak, a précisé que les pays du cartel tablaient sur une réunion en février avec les pays extérieurs, auxquels appartient la Russie, mais les observateurs du marché restaient très prudents, en premier en ce qui concerne l'attitude du membre dominant de l'OPEP, l'Arabie saoudite.

«Pour le moment, les ministres du pétrole de l'OPEP n'ont pas été en mesure de confirmer cette réunion, dont la tenue dépendra peut-être de la motivation saoudienne à changer d'attitude», a prévenu Tim Evans, de Citi, tout en estimant que Riyad pourrait s'adoucir face au pas en avant de la Russie.

«Utopique» 

Au-delà des spéculations sur l'attitude saoudienne, les analystes énuméraient surtout différents aspects actuels du marché qui laissent difficilement croire à une inflexion aussi marquée qu'une baisse de 5% de l'offre.

«Le fait que la production augmente en Irak et en Iran risque de bloquer tout accord», a ainsi estimé M. Evans. «Il faut aussi noter que la production russe a atteint en janvier un nouveau record à 10,89 millions de barils par jour (bj), ce qui témoigne de la résistance des producteurs extérieurs à l'OPEP face au bas niveau des prix.»

Aux États-Unis, troisième grand acteur du marché pétrolier avec l'OPEP et la Russie, la production donne également peu de signes de déclin, même si elle vient d'enregistrer son premier recul hebdomadaire depuis près de deux mois.

«Même si on s'amuse autour de cette idée d'une baisse de 5%, la différence entre cette éventualité et la réalité d'un accord (...) dépasse l'entendement», a renchéri Matt Smith, de ClipperData.

«Dans le Golfe, les chargements dépassent actuellement de 7% leur niveau de janvier dernier, comme l'Iran et l'Arabie saoudite les accélèrent», a-t-il remarqué.

Pour Christopher Dembik, de Saxo Banque, les investisseurs ont surtout pris conscience que la récente chute des cours avait été trop rapide.

«Les rumeurs de la part de la Russie ont servi d'excuse pour un rééquilibrage», a-t-il ajouté, jugeant lui aussi «utopique» le scénario d'une réunion de tous les pays producteurs afin de débattre d'une baisse de 5% de la production.

«Il n'y a aucune chance pour que les États-Unis, la Russie, l'Arabie Saoudite et l'Iran s'assoient autour d'une même table pour discuter des quotas», a-t-il insisté.