Les premiers puits de production commerciale de pétrole pourraient devenir réalité à Anticosti ou ailleurs au Québec dès 2020, croit le président du lobby de l'industrie des hydrocarbures.

«Pour moi, c'est clair. Si les résultats de l'exploration sont bons, c'est possible d'avoir un projet de production en 2020», a dit Michael Binnion, président de l'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), qui répondait aux questions des journalistes hier à l'occasion de la 7e conférence annuelle de l'association réunissant 300 participants dans un hôtel du centre-ville.

Des études de Québec, dévoilées à la fin d'octobre, concluaient que l'exploitation d'hydrocarbures dans l'île d'Anticosti pourrait présenter un potentiel commercialement rentable avec des retombées fiscales et financières de 650 millions par année pendant 75 ans et la création et le maintien de 2000 emplois par année.

Pour que ce rêve devienne réalité, M. Binnion est conscient que le gouvernement québécois devra au préalable adopter une nouvelle loi sur les hydrocarbures, comme le prévoit le plan d'action gouvernemental pour les hydrocarbures.

Des attentes tempérées

Questionné à propos de cet échéancier serré, le ministre québécois des Ressources naturelles, Pierre Arcand, qui était le conférencier de l'APGQ au lunch, a tempéré les attentes. «Il y a des projets plus avancés que d'autres. Les projets plus conventionnels en Gaspésie pourraient éventuellement aller de l'avant plus rapidement. Si on parle des projets comme Anticosti, je pense que ça va prendre un peu plus de temps.»

La question de l'eau (nécessaire au processus d'extraction par fracturation) à Anticosti préoccupe le ministre, de même que la question des infrastructures. «On n'est pas rendu au point de dire: il faut aller de l'avant avec Anticosti», a précisé M. Arcand.

Le ministre s'est montré encore plus prudent en ce qui a trait à une éventuelle exploitation du gisement Old Harry dans le golfe du Saint-Laurent. «Tout ce qui s'appelle Old Harry est très, très loin dans les cartes. On n'a pas véritablement de projets précis à soumettre à la population», a-t-il fait remarquer.

Des besoins pour au moins 30 ans

Invité à expliquer comment le gouvernement pouvait ouvrir la porte à une exploitation commerciale des hydrocarbures alors qu'il défendra dans quelques semaines son plan de réduction de gaz à effet de serre à la conférence de Paris, le ministre a indiqué que les Québécois allaient consommer des quantités importantes de pétrole pendant au moins les 30 prochaines années.

«Est-ce qu'on fait une exploitation des hydrocarbures ici ou si on continue de les importer? C'est là le débat», a dit le ministre, qui a répété son intention de déposer sa loi sur les hydrocarbures au printemps 2016.

Pétrolia: des travaux de 35 millions l'été prochain à Anticosti

La manne pétrolière profite déjà à l'économie de l'île d'Anticosti. De 120 à 140 personnes travailleront dans l'île à l'été 2016 dans le cadre de la seconde phase du programme d'exploration pétrolière. La société Pétrolia et ses partenaires y investiront 35 millions de dollars, une fois que le gouvernement aura délivré le certificat d'autorisation environnementale. «L'année prochaine, c'est le vrai test. Il s'agit des trois puits horizontaux avec fracturation pour savoir si, oui ou non, on peut produire des hydrocarbures», dit Alexandre Gagnon, PDG de Pétrolia. M. Gagnon participait à la conférence de l'Association pétrolière et gazière du Québec. Les travaux devraient commencer en mai 2016 et dureront six mois. Les forages avec fracturation étaient initialement prévus à l'été 2015, mais ont été reportés d'un an en raison de retards. Pétrolia a terminé l'été dernier une campagne de 12 sondages stratigraphiques: 7 en 2015 et 5 en 2014. Les travaux effectués dans l'île en 2014 et en 2015 ont donné du travail à 90 personnes, soutient l'entreprise. À Anticosti, le gouvernement du Québec a une participation de 35% dans la société en commandite qui pilote le projet, tandis que les partenaires privés Maurel et Prom, Corridor Resources et Pétrolia ont chacun 21,7% des parts.