Le géant de l'acier ArcelorMittal, aux comptes plombés par l'effondrement du cours du minerai de fer et la concurrence sur les prix de la Chine, a émis vendredi son quatrième avertissement sur résultats en trois ans et suspendu le versement de dividendes.

«Les conditions d'opération qui étaient déjà difficiles ont continué de se détériorer au cours des derniers mois en raison de baisses supplémentaires du prix de l'acier dues à des prix chinois à l'exportation exceptionnellement bas», a expliqué le PDG Lakshmi Mittal, cité dans un communiqué, à l'occasion de la publication des résultats trimestriels du groupe.

«Notre but est de garantir désormais que nous prenions toutes les mesures nécessaires pour renforcer notre compétitivité dans cet environnement difficile», a ajouté le patron du géant de l'acier, dont le cours de l'action se trouve à des plus bas historiques, oscillant depuis la rentrée de septembre autour de 5 euros.

Le titre, qui a perdu la moitié de sa valeur depuis le début de l'année, se reprenait légèrement après la publication de ces résultats conformes à ce qu'anticipaient les analystes, et gagnait 2,25 % à 12 h à 5,09 euros.

Au troisième trimestre, le groupe a replongé dans le rouge avec des pertes nettes de 711 millions de dollars contre un bénéfice de 22 millions de dollars sur la même période l'année dernière.

Sur les neuf premiers mois de l'année, les pertes atteignent déjà 1,26 milliard de dollars, soit près de dix fois plus que l'an dernier à la même période.

Les performances du groupe se sont même détériorées au troisième trimestre: le chiffre d'affaires a plongé de 22 % à 15,6 milliards d'euros et l'excédent brut d'exploitation (Ebitda) a fondu de 29 % à 1,35 milliard.

Concurrence chinoise

ArcelorMittal subit de plein fouet les conséquences de la chute de la demande provenant de Chine, qui accentue l'effondrement des cours du minerai de fer, et dont les infrastructures surcapacitaires cherchent des débouchés sur le marché mondial avec un acier à des prix moins élevés.

Dans le communiqué, M. Mittal réitère d'ailleurs son appel aux gouvernements pour qu'ils agissent contre «le commerce injuste», dénonçant une situation de «dumping», en allusion non seulement au géant asiatique, mais aussi à la Russie.

Il demande que les Etats, notamment en Europe et aux États-Unis, prennent des mesures «plus rapidement pour qu'elles soient réellement effectives», afin de protéger la production locale d'acier face aux importations.

«Les importations d'acier chinois ont augmenté de 40 % au troisième trimestre en Europe», a également pointé le directeur général Aditya Mittal, lors d'une conférence téléphonique.

Dans ces conditions, il abaisse pour la deuxième fois cette année son objectif annuel d'Ebitda, qu'il estime désormais entre 5,2 et 5,4 milliards de dollars contre 6 à 7 milliards auparavant. A la fin du premier trimestre, il avait déjà été contraint de le revoir à la baisse.

Avec ces prévisions révisées, l'Ebitda d'ArcelorMittal, qui s'était élevé à 7,2 milliards de dollars en 2014, chutera cette année de 25 à 27 %. Il s'agit du quatrième avertissement sur résultats du groupe en trois ans.

En mai, Bruxelles a ouvert une enquête antidumping sur les importations de certains produits en acier venant de Chine et de Russie et dispose d'un délai de 15 mois pour éventuellement imposer des droits de douane.

«ArcelorMittal a besoin d'un Ebitda annuel de 8 milliards de dollars, sinon il rencontre des difficultés pour maintenir son outil industriel», a expliqué à l'AFP un spécialiste de la sidérurgie, inquiet des conséquences de la faible performance opérationnelle du groupe.

Pour faire face à la dégradation de son activité, le géant de l'acier a annoncé d'ores et déjà des mesures d'économie: il réduira ses investissements et suspendra le versement de dividendes pour l'exercice 2015.

Pour l'année prochaine, il prévoit «l'optimisation de ses actifs» dans les Amériques, en particulier aux États-Unis et au Brésil, afin de dégager 1 milliard d'excédent brut d'exploitation (Ebitda) supplémentaire.

ArcelorMittal se fixe l'objectif de ramener cette année sa dette colossale à son niveau de fin 2014, soit 15,8 milliards de dollars (contre 16,8 milliards à fin septembre).

Il maintient en outre son objectif de générer un flux de trésorerie positif cette année.