L'or et l'argent ont bondi cette semaine, dopés par la demande d'actifs refuges en pleine crise irakienne et la faiblesse du dollar, tandis que les platinoïdes se redressaient en raison de l'incertitude autour de la fin de la grève en Afrique du Sud.

«L'instabilité de la situation irakienne fait craindre que la région ne tombe dans un affrontement généralisé entre chiites et sunnites, qui pourrait menacer la production de brut, donc l'or attire de nouveau les investisseurs en quête de valeurs refuges», ont expliqué les analystes de Natixis.

Le premier ministre irakien Nouri al-Maliki était sous forte pression vendredi pour tenter de sortir son pays du chaos, après un rappel à l'ordre de l'allié américain qui a annoncé l'envoi de conseillers militaires pour aider à faire face à une offensive djihadiste.

Sur le terrain, les insurgés sunnites consolidaient leur contrôle sur les larges pans de territoires pris dans quatre provinces du Nord et de l'Est du pays depuis le lancement le 9 juin de leur offensive d'envergure, et tentaient de se frayer un chemin en direction de Bagdad.

Inquiets, les investisseurs privilégiaient donc les actifs refuges, au premier rang desquels se situe le métal jaune, qui a atteint jeudi son niveau le plus élevé depuis mi-avril (à 1322,41 dollars l'once).

Ce jour-là, l'or a enregistré son plus fort pourcentage de hausse journalière depuis mi-octobre, ont signalé les analystes de Commerzbank.

«Le fait qu'il soit monté au-dessus de la barre psychologiquement importante des 1300 dollars a probablement provoqué des achats techniques, renforçant la hausse du prix», ont-ils expliqué.

L'or a entraîné l'argent dans sa hausse. Ce métal considéré comme une option alternative bon marché au métal jaune est ainsi monté vendredi jusqu'à son niveau le plus élevé depuis trois mois, à 20,98 dollars l'once.

Cette forte augmentation des métaux précieux a également été alimentée par un accès de faiblesse du dollar, qui a souffert du fait que la Réserve fédérale des États-Unis (Fed) a écarté mercredi l'idée d'une hausse de taux anticipée.

Rebond des platinoïdes

La faiblesse du dollar rend l'achat de matières premières libellées dans la monnaie américaine, telles que l'or et l'argent, moins coûteux pour les investisseurs munis d'autres devises.

Les cours du platine et du palladium se sont redressés cette semaine, après avoir chuté la semaine d'avant alors que la grève dans les mines sud-africaines semblaient prendre fin.

Une large partie du personnel des grandes mines de platine d'Afrique du Sud en grève depuis janvier est revenu dans la région de production, mais de nouvelles exigences syndicales empêchent pour l'instant une sortie de conflit, a expliqué mercredi le patronat.

Plus de 70 000 mineurs sont en grève depuis le 23 janvier à l'appel d'Amcu qui a exigé 150% de hausse du salaire de base des mineurs les moins qualifiés, les fameux 12 500 rands (880 euros environ) réclamés depuis la tuerie de Marikana en 2012 quand la police a abattu 34 mineurs en grève.

Si l'accord de principe se concrétise tel qu'il a été communiqué dans ses grandes lignes jeudi 12 juin, les mineurs les moins qualifiés obtiendraient en cinq ans un quasi doublement de leur salaire, porté de 5 500 à 10 500 rands (380 à 720 euros) par mois. La hausse serait moins élevée pour les mineurs plus qualifiés.

Les métaux industriels dopés par la Chine

Les métaux échangés sur le London Metal Exchange (LME) ont progressé cette semaine, soutenus par des propos encourageants du premier ministre chinois sur la croissance économique de la deuxième économie mondiale et un accès de faiblesse du dollar.

«Les prix des métaux évoluent positivement actuellement. Le premier ministre chinois Li Keqiang a été étonnamment sans équivoque dans son affirmation du fait que le gouvernement n'accepterait pas de croissance économique sous les 7,5 %», ont souligné les experts de Commerzbank.

Lors de sa visite à Londres cette semaine, le premier ministre chinois a en effet écarté la possibilité d'un «atterrissage brutal» de l'économie chinoise.

«Pour atteindre cet objectif, les investissements en capital fixe, parmi d'autres choses, devront être augmentés, ce qui devrait faire grimper la demande pour les métaux, et leurs prix», ont expliqué les experts de Commerzbank.

L'évolution de la deuxième économie mondiale a un impact très important sur les cours des métaux de base, la Chine étant de loin le premier consommateur mondial de ces matières premières (entre 40 % et 60 % de la demande mondiale selon les métaux).

Le groupe des métaux industriels a également profité d'un accès de faiblesse du dollar en fin de semaine, provoqué par la Réserve fédérale des États-Unis (Fed) qui a écarté mercredi l'idée d'une hausse de taux anticipée, ont expliqué les analystes du courtier Triland Metals.

La hausse des taux rendrait le dollar plus rémunérateur et ainsi plus attrayant pour les investisseurs spéculatifs. C'est pourquoi la perspective d'un maintien des taux bas a pesé sur le billet vert.

La faiblesse du dollar rend l'achat de matières premières libellées dans la monnaie américaine moins coûteux pour les investisseurs munis d'autres devises.

Vendredi, le cuivre est monté jusqu'à 6795 dollars la tonne, son niveau le plus élevé en deux semaines, tandis que l'aluminium, le plomb et l'étain ont atteint leur niveau le plus élevé depuis une semaine (à respectivement 1898 dollars, 2149 dollars et 22 850 dollars la tonne).

Plus tôt dans la semaine, l'étain était tombé à un plus bas depuis quatre mois (à 22 400 dollars la tonne mercredi) alors que le gouvernement indonésien s'apprêterait à faciliter les exportations d'étain (dont l'Indonésie est le premier fournisseur mondial), ont expliqué les analystes de Commerzbank.

L'offre indonésienne a chuté ces derniers mois, en raison de l'instauration de nouvelles règles l'année dernière, comme l'obligation de vendre l'étain via l'Indonesia Commodity & Derivatives Exchange (ICDX) avant de pouvoir l'exporter.

Le zinc au plus haut en quatre mois

Le zinc a poursuivi sa progression entamée la semaine dernière, montant vendredi à son niveau le plus élevé depuis mi-février dernier (à 2179 dollars la tonne), dans un marché en déficit d'offre.

«L'offre de zinc reste très limitée étant donné le nombre de grandes mines dans le monde qui ont récemment fermé ou s'apprêtent à le faire», ont expliqué les économistes de Natixis.

«Même avec une modeste hausse de la demande mondiale de zinc, le marché souffrira un déficit croissant», ont-ils ajouté.

Selon le Groupe international d'étude sur le plomb et le zinc (ILZSG), le marché mondial du zinc affichait déjà un déficit de 107 000 tonnes sur les quatre premiers mois de l'année.

Signe de cette offre réduite, les stocks de zinc dans les entrepôts agréés par le LME ont fondu depuis le début de l'année, tombant jeudi à leur plus bas niveau depuis fin 2010 (à 674 375 tonnes).