Le rejet du projet d'oléoduc Keystone XL représenterait un véritable cadeau pour le président russe Vladimir Poutine, et un coup dur aux efforts des États-Unis en vue d'une plus grande indépendance énergétique.

C'est ce qu'a déclaré un ancien conseiller à la sécurité nationale du président américain Barack Obama, jeudi.

Témoignant devant un comité du Sénat américain chargé de déterminer si le projet est dans l'intérêt des États-Unis, James Jones a affirmé que la rareté de l'énergie était une arme géopolitique puissante, évoquant diverses périodes en Iran et au Venezuela, l'invasion par Saddam Hussein du Koweït, et les menaces par Oussama ben Laden d'attaques contre des infrastructures énergétiques.

M. Jones a fait valoir que le plus récent exemple était la Russie, où la crainte d'une augmentation du prix du gaz, voire d'une pénurie, a un effet non seulement sur la gouvernance de l'Ukraine, mais aussi sur les tentatives de l'Europe d'imposer des sanctions économiques.

L'ancien conseiller à la sécurité nationale a rappelé que les États-Unis avaient perdu des vies et d'immenses sommes d'argent pour assurer leur approvisionnement en pétrole, mais que tout cela pouvait changer grâce à une hausse historique de la production en Amérique du Nord.

«Nous ne pouvons saisir cette occasion incroyable si nous continuons de dire non aux conditions d'infrastructures nécessaires pour développer et utiliser ces ressources», a dit M. Jones, un Marine à la retraite qui a été membre de l'administration Obama durant les 20 premiers mois de sa présidence.

«Pourquoi les États-Unis dépenseraient-ils des milliards de dollars et mettraient-ils notre personnel militaire à risque pour assurer un approvisionnement en énergie à l'autre bout du monde, tout en négligeant une occasion de permettre l'approvisionnement en énergie dans notre propre cour arrière en créant des emplois, des recettes fiscales et une plus grande sécurité?»

Les États-Unis n'arrêteront pas d'importer du pétrole à court terme. Ce sont plutôt ses fournisseurs qui pourraient changer de façon significative.

Les projections de l'Agence américaine d'information sur l'énergie (EIA) suggèrent que les États-Unis continueront d'importer des quantités similaires de pétrole brut au cours des prochaines décennies, avec quelques fluctuations à la hausse et à la baisse par rapport au niveau de 7,48 millions de barils par jour en 2013.

Mais grâce à une augmentation de la production au Canada et dans le nord-ouest des États-Unis, les routes d'approvisionnement semblent être en voie de changer. L'EIA prévoit une baisse significative des importations provenant de presque toutes les régions du monde, avec une exception majeure, le Canada, qui devrait augmenter de moitié ses exportations aux États-Unis d'ici 2040.

M. Jones a prévenu que les alliés des États-Unis observaient attentivement le débat sur l'oléoduc Keystone, tout comme les «mauvais élèves» de la scène internationale, qui espèrent voir les Américains rejeter l'occasion d'une plus grande indépendance énergétique.

«Si nous voulons faire le bonheur de M. Poutine et renforcer son jeu, nous devrions rejeter Keystone», a-t-il dit.

L'audience s'est déroulée alors que l'administration Obama étudie actuellement le projet de TransCanada [[|ticker sym='T.TRP'|]] , qui vise à acheminer le pétrole des sables bitumineux de l'Alberta vers les raffineries du Texas. Une décision est attendue d'ici quelques mois. L'administration a refusé d'envoyer un représentant à l'audience, suscitant les critiques des républicains.

Un nouveau sondage montre que même si une majorité d'Américains appuie le projet d'oléoduc, leur proportion a considérablement diminué au fil du débat sur le dossier.