Après en avoir rêvé pendant des années, Gaz Métro a finalement mis en branle le projet de prolongement de son réseau vers les alumineries, les minières et les autres gros consommateurs d'énergie de la Côte-Nord.

Le gazoduc long de 450 kilomètres entre Jonquière et Sept-Îles est un investissement de 750 millions, qui permettra aux entreprises de la Côte-Nord de remplacer le mazout qu'elles utilisent par une source d'énergie moins polluante. Il pourrait aussi inciter de nouveaux joueurs industriels à s'établir dans cette région en plein boom économique.

Gaz Métro a déjà dépensé 10 millions pour faire avancer son projet, et prévoit un investissement supplémentaire de 39,6 millions dans l'exercice en cours.

Les conditions sont réunies pour que le prolongement du réseau se réalise, explique Pierre-Yves Boivin, responsable du projet et porte-parole de Gaz Métro. Il y a d'abord le prix très bas du gaz naturel et sa disponibilité, qui incitent les entreprises à en consommer davantage. Ensuite, la Côte-Nord est en pleine effervescence économique et la région a besoin plus que jamais du gaz naturel pour alimenter sa croissance. Enfin, l'obligation pour les entreprises de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre les pousse à troquer le mazout pour une source d'énergie moins polluante.

Les astres sont bien alignés, mais le projet a tout de même besoin d'un coup de main important du gouvernement québécois pour voir le jour. Dans son dernier budget, en mars 2012, le gouvernement Charest avait accepté de contribuer financièrement au projet qui venait appuyer son Plan Nord.

Même si le nouveau gouvernement a laissé tomber le Plan Nord, du moins sous cette appellation, il maintient son appui au prolongement du gazoduc. «Des discussions sont en cours et on a bon espoir d'arriver à une entente», indique Pierre-Yves Boivin.

L'entente en question serait d'une durée de 40 ans. Elle prévoit que le gouvernement financera les études de faisabilité en cours jusqu'à un maximum de 30 millions. Une bonne partie des dépenses déjà engagées par Gaz Métro devrait donc être remboursée par le gouvernement québécois.

Si le projet va de l'avant, Québec continuera d'y contribuer jusqu'à ce qu'il atteigne la rentabilité, après quoi le gouvernement espère être remboursé à même les profits de l'opération.

Le plein de clients

Tous les consommateurs industriels potentiels de la Côte-Nord ont déjà fait connaître à Gaz Métro leur intérêt. Leur consommation représente 6 BCF (ou milliards de pieds cubes), soit une augmentation de 3% de la consommation de gaz naturel au Québec.

Québec espère que l'arrivée du gaz naturel attirera de nouvelles entreprises sur la Côte-Nord, notamment dans la transformation minière. Des entreprises comme Argex, qui veut exploiter un gisement de titane sur la Côte-Nord, ont déjà prévenu que sans gaz naturel, il n'est pas question de faire de la transformation dans la région.

Gaz Metro estime que des volumes additionnels d'au moins 6 BCF de gaz pourraient être consommés par de nouveaux joueurs industriels. Malgré ce potentiel et la contribution gouvernementale, la rentabilité du gazoduc ne sera pas au rendez-vous sans une contribution supplémentaire des entreprises consommatrices. En gros, celles-ci ont accepté de payer un peu plus cher pour le gaz naturel que si elles étaient situées ailleurs au Québec, explique Pierre-Yves Boivin. Malgré cette surprime, la facture énergétique des entreprises diminuerait, parce le gaz naturel est beaucoup moins cher que le mazout qu'elles utilisent actuellement.

Si tout se passe comme prévu, Gaz Métro veut commencer à enfouir sa conduite en 2014 et la mettre en service en 2016. Deux postes de compressions devront être construits, en Mauricie et au Saguenay, pour acheminer le gaz naturel 450 kilomètres plus loin.