Dans l'est du Québec, des travailleurs forestiers sans emploi il n'y a pas si longtemps ont l'embarras du choix entre rester sur la Côte-Nord, où ils ont finalement trouvé du travail, ou repasser de l'autre côté du fleuve pour retrouver leur job dans une scierie qui reprend ses activités.

Ce revirement s'explique par l'augmentation des prix du bois d'oeuvre, qui est actuellement à son niveau le plus haut depuis 2008. Et ça commence à avoir un impact sur le terrain, explique André Tremblay, porte-parole du Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ), qui représente l'industrie du bois, de la pâte et du papier.

Le groupe Cedrico, par exemple, a repris ses activités à sa scierie de Causapscal et se prépare à réanimer ses installations de Price. Plus de 400 travailleurs devraient être rappelés graduellement.

Il y a eu un certain redressement des prix, grâce à une hausse de la demande, précise André Tremblay, mais aussi parce que l'industrie du sciage n'a plus la taille qu'elle avait, précise-t-il.

Dans leurs bonnes années, les scieries québécoises produisaient presque 7 milliards de pieds-mesure-de-planche (PMP, la mesure utilisée dans l'industrie). La production de 2x4 et autres coupes de bois d'oeuvre dépasse à peine les 4 milliards de PMP aujourd'hui.

«Il y a moins d'offre, donc aussitôt qu'il y a un peu de demande, les prix augmentent», résume André Tremblay.

Si la situation s'améliore au Québec, c'est aussi grâce aux producteurs de la Colombie-Britannique, qui ont travaillé fort pour dénicher de nouveaux marchés depuis l'effondrement de l'économie américaine en 2008. La Colombie-Britannique, qui est de loin le plus gros exportateur de bois canadien, a vendu l'an dernier plus de bois en Chine que sur le marché américain. Ce sera probablement encore la même chose cette année.

L'appétit des Chinois pour le bois canadien a même permis à la province d'écouler son bois infesté par la dendoctrone du pin sans faire baisser les prix. West Fraser Timber et Western Forest Products, deux des plus importants producteurs de bois de la Colombie-Britannique, sont actuellement plus rentables qu'ils ne l'ont été depuis cinq ans.

Les États-Unis, la Chine et le Japon sont, dans l'ordre les principaux marchés d'exportation pour le bois de la Colombie-Britannique. Le Québec, pour sa part, écoule presque toute sa production sur le marché américain.

Du côté américain, le marché immobilier se porte mieux, ce qui contribue également au raffermissement des prix du bois d'oeuvre. Le nombre de mises en chantier est en hausse de 21,5% depuis un an, ce qui veut dire 750 000 nouvelles maisons par année.

C'est encourageant, mais c'est encore loin du rythme de croissance moyen de 1,2 million de mises en chantier par année auquel s'était habituée l'industrie québécoise du bois d'oeuvre.

La tendance est toutefois favorable. Le seuil du million de mises en chantier devrait être atteint en 2013, selon le National Association of Realtors, ce qui laisse croire qu'un nouveau cycle de croissance s'ouvre pour l'industrie du bois d'oeuvre.

Pas encore le pactole

Le prix du bois d'oeuvre a augmenté de 22,4% depuis an, mais la rentabilité des producteurs québécois ne s'est pas améliorée au même rythme. «Ils obtiennent un meilleur prix pour le bois, mais un prix moins bon pour les copeaux», indique le porte-parole du CIFQ. C'est que les fabricants de papier, qui sont le principal acheteur de copeaux, ont renégocié les prix à la baisse pour pouvoir survivre eux-mêmes à la crise.

«Au bout du compte, un producteur reçoit 70 ou 80$ de plus le mille PMP pour le bois mais de 30 à 40$ de moins par tonne de copeaux», explique André Tremblay. Certains producteurs ont pu passer du déficit à la rentabilité, mais aucun d'eux ne bat des records de profits, selon lui.