Malgré les signes d'essoufflement qui planent sur le secteur des mines et métaux sur la planète, les foreuses d'exploration continuent de pilonner le sol à un rythme record au Québec. Et les investissements dans la machinerie et autres installations destinées à arracher les minéraux du sol atteignent aussi des sommets jamais observés.

Selon des données préliminaires obtenues par La Presse Affaires, l'année 2012 pourrait voir les investissements miniers franchir le cap des cinq milliards de dollars au Québec.

L'Institut de la statistique du Québec (ISQ), qui vient d'ajuster ce chiffre à la hausse par rapport à ses prévisions du printemps, a aussi révisé ses données pour 2011, et pas qu'un peu.

Alors qu'on estimait que 3,2 milliards avaient été investis dans le sol québécois l'an dernier, le chiffre semble maintenant s'approcher davantage de 4 milliards. À titre de comparaison, les investissements avaient atteint 2,9 milliards en 2010, ce qui était déjà un record.

«C'est assez incroyable de voir ça. On parle de records absolus», lance Raymond Beullac, de la direction des statistiques économiques et du développement durable à l'Institut de la Statistique du Québec.

Tant ceux qui sondent le sol dans l'espoir de faire des découvertes que ceux qui extraient du minerai ont actuellement la pédale au plancher quand vient le temps de dépenser. En exploration seulement, les dépenses devraient totaliser tout près de 800 millions tant pour 2011 que pour 2012, selon les nouvelles estimations de l'ISQ.

«C'est revu à la hausse ça aussi. Toutes les dépenses sont plus élevées que ce que les entreprises avaient annoncé au départ», dit M. Beullac.

«C'est drôle de penser qu'au début des années 2000, les dépenses d'exploration ne dépassaient même pas 100 millions. On se disait que si ça pouvait atteindre 200 millions, on serait bien content», observe M. Beullac.

Un effet du Plan Nord? Raymond Beullac ne croit pas que le projet-phare du gouvernement Charest n'ait encore joué un rôle important dans les chiffres record qu'il a sous les yeux, sauf peut-être pour une chose.

«On voit beaucoup, beaucoup de compagnies de Vancouver qui viennent explorer au Québec, note-t-il. Je crois que c'est le Plan Nord qui amène cet intérêt-là de la part des petites sociétés.»

Essoufflement ou non?

En début de semaine, La Presse Affaires a pourtant publié un article qui faisait état d'un essoufflement du secteur des mines et métaux partout dans le monde, y compris au Canada. Selon la firme Ernst&Young, les transactions minières ont chuté de 26% pendant les six premiers mois de l'année au Canada par rapport à l'an dernier. En dollars, la chute atteint 41%.

Raisons invoquées par Ernst&Young: le ralentissement chinois, l'incertitude économique mondiale, la hausse du coût de développement des projets miniers et la baisse des prix des métaux. Mercredi, on apprenait aussi que le géant minier BHP a retardé des projets totalisant 68 milliards US à cause du contexte difficile.

Contradiction? Peut-être pas. Selon M. Beullac, on peut penser qu'en mettant la pédale douce sur les fusions et acquisitions, les entreprises minières ont économisé des sommes qu'elles ont pu redéployer directement dans le sol, notamment au Québec.

Une situation qui semble sur le point de se renverser. Dans son rapport, Ernst&Young montre en effet que le prix des entreprises minières à acquérir a tellement baissé que les fusions et acquisitions sont reparties de plus belle en juin, les grands groupes bien capitalisés profitant des bons prix pour magasiner. La firme prédit d'ailleurs une migration des capitaux de la construction de mines vers les transactions financières.

Même s'il hésite à faire des prévisions, Raymond Beullac, de l'ISQ, ne serait d'ailleurs pas surpris de voir un recul des investissements miniers au Québec en 2013.

«Mon impression en ce moment, c'est qu'il pourrait y avoir une baisse. Il n'y aurait rien d'anormal là-dedans», dit-il.