Malgré l'opposition claire de la nation crie de Mistissini et même si l'allure des audiences publiques du projet d'uranium Matoush montre l'absence d'acceptabilité sociale, la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) n'aura pas à considérer les aspects sociaux du projet quand elle décidera de délivrer ou non un permis au promoteur Ressources Strateco.

Tout indique que c'est la sous-ministre de l'Environnement du Québec (dans le cadre de la Convention de la Baie-James) qui devra trancher sur cette question, si la CCSN accorde le permis à Strateco pour son programme d'exploration souterraine de quatre ans. Québec disait justement vouloir attendre les audiences de la CCSN avant de se prononcer. Le ministre fédéral de l'Environnement a déjà donné son accord au projet.

Mardi soir, le chef de la nation crie de Mistissini, Richard Shecapio, a déclaré que sa communauté ne voulait pas du projet Matoush. Plus encore, la communauté demande un moratoire national sur l'activité minière uranifère. Dans les deux jours d'audiences publiques tenues par la CCSN à Mistissini, la très grande majorité des intervenants ont pris position contre le projet.

En ouverture des audiences, mardi matin, le président de la CCSN, Michael Binder, a souligné que dans leurs mémoires, plusieurs intervenants «ont soulevé des questions sur le futur de l'énergie nucléaire ou de l'activité minière uranifère au Québec. Plusieurs demandent un moratoire sur les mines d'uranium.»

Or, ce n'est pas dans le mandat du tribunal de juger des questions de nature politique, a expliqué M. Binder. «C'est le gouvernement du Québec qui doit répondre à ces questions fondamentales de politique énergétique, pas à cette commission.»

La CCSN a décliné notre demande d'entretien avec M. Binder, mais un porte-parole a confirmé que les aspects sociaux ne font pas partie du mandat de l'organisme.

Durant les audiences publiques, le représentant de Mines Alerte Canada, Ramsey Hart, a déclaré à la commission que de ne pas se prononcer sur les aspects sociaux d'un projet allait miner la crédibilité de l'organisme. Il a invité la CCSN à «au moins signaler le problème».

«Que vaudrait un permis émis par la CCSN sans que celui-ci ne tienne compte des impacts sociaux ?» demande pour sa part Ugo Lapointe, de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine.