Hydro-Québec assure qu'elle ignorait que ses gisements sur l'île d'Anticosti auraient recelé quelque 3000 milliards de barils de pétrole non conventionnel lorsqu'elle les a vendus en 2008 à Pétrolia.

«On n'avait pas cette information-là», a avoué mercredi son PDG, Thierry Vandal. Malgré tout, il assure que la société d'État a fait une «transaction prudente et raisonnable». «On est satisfait des droits qui existent», a-t-il répondu. Il refuse par contre encore de révéler la somme récoltée. «C'est une entente commerciale couverte par des clauses de confidentialité», justifie-t-il.

Lors de la vente, Hydro-Québec croyait que le gisement recelait combien de barils? M. Vandal refuse de répondre. «La question ne se posait pas, dit-il. On avait établi que les techniques classiques d'exploration n'avaient pas conduit aux résultats qu'on escomptait. C'est pour cela qu'on a cédé les permis.» Selon lui, Hydro-Québec n'était pas assez familière avec la fracturation hydraulique pour évaluer les gisements non conventionnels, comme le pétrole ou le gaz de schiste.

Pourtant, en 2003, des scientifiques québécois réunis en colloque annonçaient déjà que d'importants gisements se trouveraient sur l'île. Ils rappelaient alors que dans les 10 dernièresannées, quelque 100 millions de dollars (public et privé) y avaient été investis en prospection. L'émission Découverte avait même consacré une émission sur le sujet en 2004. Hydro-Québec songeait d'ailleurs à y faire des forages dès 2004. Mais en 2005, le gouvernement Charest a démantelé la division Pétrole et gaz d'Hydro-Québec.

La fracturation hydraulique est interdite au Québec durant l'étude environnementale stratégique sur les gaz de schiste.

M. Vandal a rappelé que Hydro-Québec conserve un droit de veto si Pétrolia cherche un partenaire pour exploiter la ressource. Et elle touchera aussi des «redevances prioritaires» sur la ressource. «S'il y a des milliards de barils, on va faire des milliards de dollars», a-t-il lancé. Le pourcentage de cette redevance reste toutefois secret.

«Si ça ne valait rien, pourquoi avez-vous exigé des redevances significatives?», a demandé le député du PQ Bernard Drainville.

Le ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, a douté du potentiel des droits de forage. Il a rappelé que la valeur boursière de Pétrolia était de «moins de 100 millions de dollars».

Investissement Québec ne semble pas avoir les mêmes réserves. Cette semaine, elle a investi 10 millions dans Pétrolia.

C'était la première fois que M. Vandal acceptait de répondre aux questions des élus lors de l'étude des crédits du ministère des Ressources naturelles. Peu après son entrée en fonction l'automne dernier, M. Gignac se préoccupait de la «transparence» d'Hydro-Québec.

Dépassement de coûts à Gentilly-2, reconnaît Vandal

Le gouvernement libéral n'a pas encore décidé s'il fermait ou faisait laréfection de la centrale nucléaire Gentilly-2, mais les travaux ont déjà commencé. Hydro-Québec a dépensé plus de 850 millions de dollars dans le projet, a reconnu M. Vandal.

Il rappelle que le projet de réfection avait obtenu le feu vert en 2008. Le gouvernement a ensuite demandé à Hydro-Québec de mettre à jour ses analyses, en raison entre autres des délais et dépassements de coûts d'environ 50% à sa centrale jumelle de Pointe-Lepreau au Nouveau-Brunswick.

«Ce n'est pas un projet qui doit démarrer. Il est démarré, on a réalisé des investissements. C'est la poursuite du projet et le rythme (qui reste à être décidé)», dit M. Vandal.

L'estimé de coût initial du projet était de 1,9 milliards. Près de la moitié des dépenses estimées au départ ont donc déjà été faites. «Je ne peux pas vous dire quel pourcentage ça représente sur l'ensemble (des dépenses àfaire)», affirme toutefois le patron de la société d'État. Car il reconnaît que le projet coûtera plus cher que prévu.

Selon nos informations, le dernier estimé s'élève à plus de trois milliards. «On n'est plus à 1,9 milliards, à l'évidence, c'est le cas. Mais je ne suis pas en mesure de vous confirmer un autre chiffre que celui qui avait été communiqué en août 2008», a réagi M. Vandal.

Hydro-Québec doit remettre dans les prochains mois son estimé final au ministre Gignac. Ce dernier s'est engagé mercredi à la rendre public. M. Vandal rappelle qu'en plus du coût de réfection, le gouvernement devra s'intéresser aux «retombées économiques régionales» de la seule centrale nucléaire du Québec, avec ses 800 emplois, et des «considérations stratégiques».

Si la centrale devait être fermée (déclassée), l'argent déjà investi ne sera pas complètement perdu. Certains équipements pourront être vendus, croit M.Vandal.