Les cours du pétrole creusaient leurs pertes mercredi en fin d'échanges européens, plombés par une hausse trois fois plus forte que prévu des stocks américains de brut, malgré des inquiétudes persistantes sur l'offre d'or noir.

Vers midi, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai s'échangeait à 123,75$, en baisse de 1,76$ par rapport à la clôture de mardi.

Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de «light sweet crude» (WTI) pour la même échéance perdait 2,56$ à 104,77$.

Selon des chiffres publiés mercredi par le département américain de l'Énergie (DoE), les stocks de brut des États-Unis ont progressé de 7,1 millions de barils lors de la semaine achevée le 23 mars, alors que les analystes s'attendaient à une hausse trois fois moindre et que la fédération professionnelle API avait fait état mardi d'une hausse de 3,6 millions de barils.

Ces chiffres étaient de nature à alimenter des inquiétudes sur la demande toujours terne d'or noir du plus gros consommateur d'hydrocarbures au monde.

Les stocks d'essence ont pour leur part reculé de 3,5 millions de barils, plus fortement que prévu, et ceux de produits distillés (dont le gazole et le fioul de chauffage) ont également enregistré un repli plus important qu'attendu, en baisse de 700 000 barils.

Un indicateur américain mitigé venait appuyer cette tendance. Les commandes de biens durables ont rebondi aux États-Unis en février, sans toutefois combler leur recul du mois précédent, selon des chiffres diffusés mercredi.

En outre, les cours pliaient sous le coup de «spéculations sur le fait que la France, le Royaume-Uni et les États-Unis, étudient un éventuel recours à leurs réserves stratégiques (de pétrole) afin de faire pression sur des cours du brut», toujours très élevés et pénalisants pour la reprise économique mondiale, commentait Kathleen Brooks, analyste chez Forex.com.

Le ministre français de l'Énergie, Eric Besson, a déclaré mercredi que la France est «favorable à puiser dans ses réserves stratégiques de pétrole» afin de lutter contre la hausse des cours du brut, en soulignant que «ce sont les États-Unis qui l'ont demandé».

Mais «le recours aux réserves stratégiques a tendance à n'avoir qu'un effet temporaire sur les cours», qui remontent rapidement à leur niveau d'avant intervention, prévenait Mme Brooks.

«Cependant, les risques persistants qui pèsent sur l'offre empêchent tout repli brutal des cours», observaient les analystes de Commerzbank.

«La production de pétrole et de gaz en mer du Nord devrait s'inscrire en déficit après l'évacuation de deux plate-formes du fait d'une fuite» de gaz sur une plate-forme du groupe français Total, expliquait-on chez Commerzbank.

Mais c'est surtout l'aggravation des tensions entre le Soudan et le Soudan du sud qui inquiétait les observateurs, malgré des signes encourageants en début de semaine sur une résolution prochaine du différent qui les oppose autour d'une région pétrolifère du Soudan du sud, théâtre désormais d'une escalade militaire entre les deux voisins.

Les relations entre les deux États se sont détériorées depuis janvier quand le Soudan du sud a interrompu sa production de pétrole, qui s'établit à 350.000 barils par jour, accusant Khartoum de détourner illégalement une partie du brut sud-soudanais transitant sur son territoire.

Et alors qu'«il y a désormais un risque de guerre», notait Commerzbank, «la production ne devrait pas reprendre de sitôt».