La chute prononcée du cours de l'action de Suncor (T.SU) amorcée au mois de mars a laissé des séquelles. En effet, même si l'environnement est redevenu plus intéressant compte tenu de la hausse du prix du pétrole et que les plus récents résultats trimestriels ont été bons, l'action éprouve maintenant de la difficulté à conserver l'élan retrouvé au début du mois d'octobre.

Rappelons qu'à partir du mois de mars, le prix de l'action de Suncor a été entraîné dans une spirale à la baisse qui lui a fait perdre près de la moitié de sa valeur. En neuf mois, le titre est passé de 47$ à 25$. Il a ensuite rebondi à 34$ avec la reprise d'octobre, mais il peine maintenant à se maintenir au-dessus de 30$.

Dans sa chute, Suncor a percé ses principaux niveaux de support identifiés par les analystes techniques, soit la moyenne mobile de 200 jours, ainsi que le niveau de 30$ qui avait été son creux de toute l'année 2010.

Pourquoi une telle baisse?

Lorsque les gestionnaires internationaux décident de réduire leurs positions dans le secteur pétrolier, ils se tournent rapidement vers le Canada et ils vendent des actions de Suncor, le plus gros producteur intégré au Canada, explique Daniel Lavoie, gestionnaire de portefeuilles adjoint chez FieraSceptre. Ce phénomène a probablement accéléré la chute de Suncor lorsque le prix du pétrole était en baisse durant l'été.

De plus, Suncor est un titre à bêta élevé, soit 1,6. Cela veut dire que l'amplitude des variations du cours de l'action est généralement plus prononcée que celle du marché lui-même. Lorsque les marchés se mirent à dégringoler sous la pression du problème des dettes européennes à la fin de l'été, le cours de Suncor a chuté encore plus vite.

Il y a aussi le dossier environnemental. Des investisseurs auraient de plus en plus de difficulté à engager l'argent de leurs clients dans les sables bitumineux, indique un gestionnaire montréalais qui préfère garder l'anonymat.

De bons résultats

Pourtant, les résultats et les perspectives de Suncor sont intéressants, souligne M. Lavoie. Au troisième trimestre, la firme a réalisé des bénéfices de 1,3 milliard, et généré des flux de trésorerie de 2,7 milliards.

Les sables bitumineux sont au coeur des activités de Suncor. Elle en tire 350 000 barils de pétrole par jour, soit 60% de sa production. On prévoit un taux de croissance annuel de 13% de ces activités dans les sables bitumeux. Suncor offre donc aux investisseurs une croissance intéressante, car elle possède des réserves pour longtemps.

De plus, Suncor a bien géré sa dette, selon M. Lavoie, puisqu'elle a été réduite de moitié en quatre ans.

La firme prévoit des dépenses en capital de 7,5 milliards en 2012. Au rythme actuel, ses flux de capitaux libres atteindront plus de 2,5 milliards. Elle pourra donc se permettre de hausser quelque peu son dividende et de racheter une partie de ses actions. Le gestionnaire de FieraSceptre envisage d'augmenter ses positions dans Suncor.

Mais les coûts

Ce sont les coûts qui inquiètent les investisseurs, souligne Michael Dunn, analyste chez FirstEnergy Capital à Calgary. La firme a indiqué que ses coûts de production dans les sables bitumineux l'an prochain se situeront entre 37$ et 40$ le baril. C'est un peu plus élevé que ce que la majorité des analystes estimait. L'inflation en Alberta fait son oeuvre. L'analyste maintient quand même son cours cible pour les 12 prochains mois à 43$.

Encore plus optimiste, Greg Pardy, analyste chez RBC Dominion Securities, croit que le titre pourrait même atteindre 49$ l'an prochain. «Suncor est notre titre préféré du secteur étant donné la visibilité concernant les prévisions de production, la solidité de ses états financiers et ses immenses réserves dans les sables bitumineux», dit-il. À cause des inquiétudes bien légitimes concernant les coûts, les bons résultats de Suncor sont passés inaperçus, selon lui.

Économie chancelante, incertitude quant au prix du pétrole, inflation des coûts et environnement, autant de facteurs qu'aura à affronter Suncor pour que son titre se relève.