La demande mondiale d'or est dopée par un appétit accru des investisseurs, inquiets de l'économie chancelante et des déboires de la zone euro, mais également par les achats des banques centrales qui ont atteint cette année leur plus haut niveau depuis 40 ans.

Au troisième trimestre 2011, la consommation mondiale d'or a progressé de plus de 11% par rapport au trimestre précédent, pour s'élever à 1054 tonnes (soit une valorisation record de 58 milliards de dollars), a indiqué jeudi le Conseil mondial de l'or (CMO), fédération professionnelle du secteur.

Le marché a été avant tout tiré par la demande d'investissement (principalement en lingots et médailles), en hausse de 25% à 468 tonnes, par opposition à la demande d'or dans la joaillerie, qui n'a progressé que de 2,6%, à 465 tonnes.

Cette demande d'investissement est particulièrement nette en Chine, où elle a bondi de 25% par rapport au troisième trimestre 2010, et en Europe, où elle s'est envolée de plus de 135% sur un an, pour atteindre une valeur record de 4,6 milliards d'euros (pour 118 tonnes).

«Pour un investisseur, l'or est source de diversification, car c'est un actif dont la valeur est considérée comme inaltérable dans le temps, un atout quand les marchés boursiers sont sous pression. C'est une assurance contre un krach économique ou les politiques monétaires trop souples» entretenant l'inflation, a expliqué Gaurav Saroliya, stratégiste chez Lloyds Banking Group.

Face à la volatilité des places boursières, aux convulsions du marché obligataire et aux tensions inflationnistes (contre lesquelles il est censé être un bon bouclier), «les investisseurs cherchent à se protéger», a confirmé Marcus Grubb, l'un des directeurs du CMO.

À telle enseigne que le cours de l'or a bondi de près de 25% entre le début mai et son sommet historique atteint début septembre à 1921 dollars l'once.

Les banques centrales, redevenues en 2010 acheteurs nets d'or à l'échelle mondiale pour la première fois depuis 22 ans, montrent elles aussi un appétit croissant.

Les achats nets des banques centrales ont représenté dans le monde quelque 150 tonnes au troisième trimestre, plus du double du trimestre précédent - à comparer avec un peu moins de 100 tonnes pour l'ensemble de l'année 2010.

D'ores et déjà, ces achats nets atteindront cette année leur plus haut niveau depuis plus de 40 ans et la fin du système de Bretton-Woods autour de l'étalon-or.

«Les pays en développement sont riches en devises, particulièrement en dollars, et cherchent à renforcer leurs réserves en accroissant la proportion d'or» face aux incertitudes sur la valeur des obligations occidentales, explique Nic Brown, analyste de Natixis.

Après le Mexique, qui avait acheté 100 tonnes d'or au premier trimestre, la Russie et la Bolivie (qui achètent la production aurifère locale), ainsi que la Thaïlande, ont réalisé des acquisitions importantes entre juillet et septembre, entre 15 et 25 tonnes d'or chacune.

En revanche, selon le CMO, une ou plusieurs banques centrales encore non identifiées de la zone euro ont vendu au total 4,6 tonnes d'or depuis fin septembre, une accélération symptomatique de la crise des liquidités en Europe.

Cependant, l'or pourrait commencer à voir se ternir son étoile auprès des investisseurs particuliers: la forte volatilité des cours de l'or, qui ont décroché de 10% depuis leur sommet de septembre, «peut effrayer certains, à la recherche d'un actif sûr et stable», observe Nic Brown.

«D'autant que si on regarde les frais imposés» par les firmes financières pour stocker le métal jaune, «l'or reste une option relativement onéreuse pour un investisseur», ajoute M. Brown.