Une série de décisions américaines allant à l'encontre des intérêts du Canada met en relief la nécessité pour le pays de s'assurer un accès aux marchés asiatiques pour ses produits énergétiques, a soutenu le premier ministre Stephen Harper, dimanche.

Alors que M. Harper et le président américain, Barack Obama, prenaient une marche amicale sur une allée bordée de palmiers, en marge du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) qui s'est déroulé à Hawaï, il semblait évident que le délai annoncé par les États-Unis dans le projet de pipeline d'une entreprise canadienne était encore une source de divergences entre les deux pays.

Selon des rapports officiels sur la rencontre tenue dimanche entre mm. Harper et Obama, le premier ministre canadien a fait part de sa déception face à la décision du département d'État d'exiger un nouveau tracé de TransCanada pour son projet de 7 milliards $, en plus de le soumettre à d'autres études d'impacts environnementaux.

L'oléoduc de 2700 kilomètres transporterait les sables bitumineux du nord de l'Alberta jusque dans les raffineries du Texas, le coeur de l'industrie de la raffinerie aux États-Unis.

Le président Obama a toutefois défendu la décision du département d'État américain de reporter le projet Keystone XL, soutenant qu'il fallait d'abord «s'assurer que tous les aspects soient étudiés et que l'ensemble des impacts possibles sur l'environnement soient connus».

Plus tôt en journée, M. Harper s'était dit confiant que le projet de pipeline de TransCanada, une société basée à Calgary, serait approuvé au final.

Il avait ajouté que la décision de reporter le projet, de même qu'une série d'autres mesures adoptées par les États-Unis ayant soulevé des interrogations à propos de la solidité de la relation entre Ottawa et Washington, n'étaient que des produits d'un «contexte politique particulier», et qu'elles n'illustraient pas un changement de cap des autorités américaines.

Mais il a toutefois reconnu qu'il était temps pour le Canada de se tourner vers l'est.

M. Harper a répété que son pays était «déçu» par la décision de l'administration Obama de repousser d'au moins un an son verdict concernant le projet controversé d'oléoduc reliant le Canada au Texas.

Il a déclaré avoir évoqué ce sujet avec le président chinois Hu Jintao, qu'il a rencontré samedi en tête-à-tête.

«Cette décision (des États-Unis) nous indique la nécessité d'avoir la capacité de vendre nos produits énergétiques à l'Asie et j'ai déjà discuté de cette situation hier avec le président de la Chine», a déclaré M. Harper.

Ottawa a aussi fait part de sa volonté de s'assurer un accès aux marchés asiatiques, revenant du même coup sur une décision précédente, selon laquelle l'adhésion du Canada au Partenariat trans-Pacifique (TPP) ne serait pas forcément conforme aux intérêts nationaux.

Selon les observateurs, les politiques canadiennes en matière d'approvisionnement dans les secteurs du lait, des oeufs et de la volaille constituent le principal obstacle à la participation du pays au nouvel accord de libre-échange élaboré par les nations de la région Asie-Pacifique. M. Harper s'est toutefois montré clair dimanche, annonçant que le Canada voulait débattre à la table des négociations du TPP.

L'Australie, le Bruneï, le Chili, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, le Singapour, les États-Unis et le Viêt Nam ont émis un communiqué conjoint samedi, disant qu'ils s'étaient entendus sur les grandes lignes du nouveau traité et qu'ils avaient l'intention de poursuivre les discussions l'an prochain.

MM. Harper et Obama ont aussi échangé à propos d'un futur partenariat sur le périmètre de sécurité à la frontière entre les deux pays, le premier ministre canadien précisant qu'une annonce en ce sens serait imminente.

M. Obama a d'ailleurs invité M. Harper à Washington en décembre.

L'administration Obama a par ailleurs renouvelé les clauses «Buy America». Le président Obama a aussi suggéré, dans le budget soumis la semaine dernière, l'imposition d'une taxe de 5,50 $ pour les voyageurs canadiens à leur entrée aux États-Unis.

«Il faut se rappeler que ces décisions ne sont pas toutes finales», a avisé M. Harper. «Je crois que les Canadiens auraient tort de croire que ces décisions sont des messages d'opposition au Canada.»

- Avec AFP

Photo: Reuters

Stephen Harper et le président chinois Hu Jintao lors de la «photo de famille» du sommet de l'APEC, dimanche.