Une dizaine de papetières ont fermé depuis 2005 au Québec. Il en reste une quarantaine. Le pire est-il passé?

Au Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ), André Tremblay, président-directeur général, croit que oui. «Par contre, on ne peut pas vous dire s'il y aura encore des ajustements», précise-t-il.

Luc Bouthillier, professeur au département des sciences du bois et de la forêt à l'Université Laval, ne croit pas que le pire est passé. «Plusieurs papetières s'accrochent, dit-il. Elles pensent encore que c'est une mauvaise passe, mais ce n'est pas ça.»

Le professeur affirme qu'en 2000, on consommait environ 13 millions de tonnes de papier journal en Amérique du Nord, contre un peu plus de 5 millions aujourd'hui.

«Cinq millions de tonnes, c'est la capacité de production du Québec. Il y a un problème. Le monde passe au numérique. Ça ne reviendra pas. La consommation de papier journal continue à chuter», affirme M. Bouthillier.

Le CIFQ a toutefois de nouveaux marchés en tête.

«Les pays en émergence où le niveau d'alphabétisation s'élève sont de bons marchés potentiels. Les gens veulent s'informer, mais ils n'ont pas les moyens de s'acheter un iPad», affirme André Tremblay.

Luc Boutillier n'y croit pas vraiment. «Nos entreprises n'y sont pas présentes, contrairement aux pays scandinaves.»

Pour prendre une part de marché, nos papetières devront déloger d'autres acteurs avec de meilleurs prix.

«D'importants efforts ont été faits au cours des dernières années pour diminuer les coûts de main-d'oeuvre et réduire les dettes. Je crois qu'il faut maintenant réfléchir à la question énergétique. Les papetières, contrairement aux alumineries, n'ont pas de tarif préférentiel», affirme M. Tremblay.

Bioraffinage

Le président du CIFQ mise également sur de nouveaux produits. Il donne l'exemple de la papetière de Thurso, en Outaouais, qui fabriquera une pâte utilisée pour faire de la rayonne.

Cette fois, Luc Bouthillier est enthousiaste. «C'est un bel exemple de bioraffinage. L'avenir est là. Plus de 200 produits peuvent être fabriqués en utilisant de la matière ligneuse renouvelable plutôt que des produits pétroliers. Cela nécessitera par contre des investissements importants. Après une longue période de crise, ce sera difficile pour les entreprises.»

D'autant plus que le dollar canadien continue d'être élevé.

«Les papetières exportent 90% de leur production», précise M. Tremblay.

Le dossier des gaz à effet de serre (GES) pourrait aussi avoir un impact. Le gouvernement s'apprête à mettre sur pied un système de réduction et d'échange de crédits d'émissions de GES.

«Le gouvernement souhaite prendre 2008 ou 2009 comme année de référence, déplore M. Tremblay. Depuis 1990, l'industrie des pâtes et papiers a baissé ses émissions de plus de 50%. Nous demandons au gouvernement de prendre 1990 comme référence. Comme ça, si le marché des crédits prend son envol, à disons 15$ la tonne, cela représenterait pour l'industrie des revenus d'environ 25 millions. On en aurait bien besoin.»