Ulcérée par le projet de réforme de la Loi sur les mines, en particulier par l'interdiction de l'activité minière dans les «périmètres urbanisés», l'Association de l'exploration minière du Québec (AEMQ) a lancé à ses membres un appel à la mobilisation tous azimuts.

«Vous devez rejoindre votre conseiller municipal, votre maire, votre préfet, votre président de chambre de commerce et votre député et leur exprimer vos préoccupations et les conséquences qui s'en suivront si ce projet est adopté tel quel», écrit le président de l'Association, Ghislain Poirier, dans une lettre envoyée à ses membres le 21 juin.

«C'est un enjeu majeur pour les membres, a dit M. Poirier à La Presse. C'est tout le climat d'investissement qui est touché. On instaure une fragilité qui est loin d'être négligeable.»

L'AEMQ déplore qu'on ne l'ait pas consultée avant le dépôt du projet de loi, le 12 mai dernier. Le projet propose de ne plus accorder de nouveaux droits miniers sur les terrains situés dans les zones urbaines et de villégiature.

«Pour les titres qui existent déjà dans les zones urbanisées, le pouvoir est délégué aux municipalités, dit M. Poirier. Une société qui a agi de bonne foi peut se voir expulsée. Ce n'est pas qu'on ne veut pas travailler avec les municipalités, mais le gouvernement s'y prend mal.»

Le projet de loi causerait «potentiellement un préjudice aux conséquences économiques incalculables pour des centaines de PME minières, écrit M. Poirier, ce qui serait un précédent dangereux pour des droits légalement acquis».

«L'Association lance donc une campagne de sollicitation spéciale auprès de ses membres corporatifs afin de monter un trésor de défense de nos droits. Notre cible est de récolter 1,5 million.»

«Ils affirment que leurs droits sont atteints et menacés, dit Ugo Lapointe, de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine. Qu'en est-il des droits des citoyens et des municipalités? Et de ceux de certaines communautés autochtones? Et de l'environnement?

»Un mouvement de panique»

La réaction de l'AEMQ est exagérée, selon Christian Simard, de Nature Québec, membre de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine. «Le périmètre urbanisé, c'est 0,5% du territoire québécois, dit-il. Et dans le Nord-du-Québec, on ne parle pas vraiment de périmètre urbain. Évidemment, il reste à définir ce qu'est une zone de villégiature. Mais on sent qu'il y a un mouvement de panique dès qu'on parle d'améliorer un tout petit peu le régime minier.»

«Quand même que c'est 1% ou 2% du territoire, dit M. Poirier, cela fragilise les investissements miniers. Les investisseurs internationaux ont des choix à faire en fonction des risques. La planète est grande.»

M. Simard s'inquiète aussi de l'inégalité des forces en présence dans ce débat. «Ils parlent d'amasser 1,5 million, mais nous, nous n'avons rien. La Coalition pour que le Québec ait meilleure mine fonctionne avec 2000 ou 3000$.»

La réaction de l'AEMQ est néanmoins «un signe que les choses commencent à bouger», dit-il. «L'industrie n'est pas habituée à ce que le gouvernement ne fasse pas exactement ce qu'elle veut.»

Ugo Lapointe estime quant à lui que la lettre de M. Poirier «dévoile le vrai visage des lobbies rétrogrades de cette industrie».

«Derrière les discours d'acceptabilité sociale et les campagnes de relations publiques que l'industrie met à l'avant-scène se cache en fait un lobby qui ne veut faire aucune concession sur les très nombreux privilèges dont l'industrie bénéficie depuis maintenant plusieurs décennies», dit-il.