La pause décrétée par Québec dans l'exploitation du gaz de schiste a été saluée comme un «pas dans la bonne direction» par les environnementalistes et les municipalités, mais les investisseurs ne sont manifestement pas de cet avis. Les entreprises qui sont actives dans ce domaine ont subi une bastonnade en Bourse, hier, si bien que certaines ont perdu le quart de leur valeur.

Le gouvernement Charest s'est rendu à la principale recommandation du Bureau des audiences publiques sur l'environnement (BAPE), dont il a dévoilé le rapport mardi en fin de journée. Le ministre de l'Environnement, Pierre Arcand, a reconnu la nécessité de dissiper les craintes que suscite l'exploitation de la ressource avant d'y donner son feu vert. L'extraction de la ressource devra donc attendre au moins 18 à 30 mois, le temps de terminer une «évaluation environnementale stratégique».

L'annonce a été faite mardi à 16h, alors que les marchés étaient sur le point de fermer. Dès la réouverture de la Bourse de croissance du TSX, hier matin, toutes les sociétés actives dans l'exploration du gaz de schiste ont perdu des plumes. Et certaines beaucoup plus que d'autres (voir le tableau).

Questerre, société albertaine qui détient les droits d'exploration sur 123 134 hectares dans la vallée du Saint-Laurent, a vu son titre plonger de 24,53%. Junex et Gastem, des entreprises québécoises qui sont elles aussi très actives dans la région, ont essuyé une correction elles aussi. Leurs titres ont respectivement fondu de 20% et de 21% (voir tableau).

Même Pétrolia, pourtant davantage active dans l'exploration pétrolière en Gaspésie, a été entraînée vers le bas hier. Son titre a perdu 35 cents, ou 21% de sa valeur.

La réaction des investisseurs d'hier ne surprend pas Vincent Paquet, analyste principal pour la firme Intact. Tout le monde sait que du gaz naturel est emprisonné dans le sous-sol de la vallée du Saint-Laurent, explique-t-il, mais personne ne sait exactement quelle quantité. Les forages exploratoires n'étant pas terminés, il aurait fallu attendre au moins un an avant d'extraire du gaz à grande échelle. Or, l'annonce de Québec repousse l'échéance d'environ deux ans au bas mot.

«Acheter un titre pour quelque chose qui va se passer dans un an ou deux, ce n'est pas nécessairement très intéressant», souligne M. Paquet.

Les entreprises qui se maintiendront le mieux sont celles qui misent sur d'autres activités que l'exploitation du gaz de schiste québécois, estime l'analyste. Dans ces circonstances, il n'est pas étonnant que Talisman, considéré comme le plus important acteur de l'industrie au Québec, ait terminé la séance d'hier avec des pertes modestes. Le titre de la société albertaine s'est déprécié de 38 cents, ou 1,6%, au TSX, hier.