Dans un marché en pleine effervescence comme celui du cuivre, la course aux ressources force la consolidation des sociétés pour assurer leur croissance. Quitte à briser des mariages. La minière australienne Equinox Minerals (T.EQN) met ainsi 4,8 milliards sur la table pour acheter la canadienne Lundin Mining (T.LUN), qui avait pourtant déjà passé la bague au doigt d'Inmet Mining (T.INM).

> Suivez Hugo Fontaine sur Twitter

Ce ménage à trois donne un bon indice de ce que sera l'année 2011 dans le secteur minier. «Les transactions vont s'intensifier parce que beaucoup de pays et de sociétés voudront sécuriser leurs sources d'approvisionnement et leurs ressources, explique Zahid Fazal, associé chez Ernst&Young à Montréal et leader du secteur des mines pour le Québec. Et les sociétés disposent de beaucoup d'argent en raison des prix élevés des ressources.»

Le prix du cuivre a augmenté de 50% depuis juillet dernier. L'offre ne parvient pas à suivre l'augmentation de la demande des pays émergents.

La bataille qui s'annonce entre Equinox, Inmet et Lundin met en vedette trois acteurs aux capitalisations boursières semblables (entre 4 et 4,5 milliards).

Le 12 janvier, Inmet et Lundin ont annoncé une fusion pour former une nouvelle société nommé Symterra. Les actionnaires de Lundin devaient se prononcer sur cette offre le 14 mars. Chacune des parties a convenu de ne pas solliciter d'offre concurrente. Des frais de résiliation de 120 millions sont prévus.

Cela n'a pas empêché Equinox de déposer une offre hostile dimanche. Une surprise, selon Onno Rutten, analyste chez UBS. Equinox propose 8,10$ pour chaque action de Lundin, ou 1,29 action d'Equinox pour chaque action de Lundin. Cela représente une prime de 26% par rapport à la clôture des transactions, vendredi dernier, tandis que l'offre d'Inmet n'offre aucune prime. Equinox a contracté un crédit-relais de 3,2 milliards US pour financer la transaction.

«L'offre d'Equinox est supérieure et le scénario le plus probable est qu'elle soit acceptée sans bonification», soutient l'analyste d'UBS. Selon lui, Inmet n'a pas la capacité d'égaler l'offre et doit utiliser son argent disponible pour développer un projet minier majeur au Panama.

Un autre analyste consulté par La Presse Affaires indique toutefois qu'en comparaison avec la fusion Lundin-Inmet, l'offre d'Equinox augmenterait la dette de la nouvelle entreprise, tout en diminuant le ratio de production de cuivre pour chaque action. L'option de la fusion offrirait aussi une meilleure exposition au zinc. Ainsi, estime cet analyste préférant ne pas être cité, Inmet pourrait convaincre les actionnaires de Lundin en augmentant son offre monétaire, mais sans nécessairement égaler cette d'Equinox.

Equinox soutient qu'une combinaison Equinox-Lundin offre un bien meilleur potentiel de croissance que Symterra. Le duo Equinox-Lundin créerait un producteur de cuivre intermédiaire se classant dans le top 20 mondial. Mais Equinox anticipe une croissance annuelle moyenne de 23% pour les six premières années de la nouvelle entité, de sorte qu'elle pourrait se retrouver dans le top 10 d'ici 2016 avec une production d'environ 500 000 tonnes.

Equinox n'a pu prendre contact directement la direction de Lundin en raison des dispositions de l'entente entre Lundin et Inmet. Le conseil d'administration de Lundin est en train d'étudier l'offre, a annoncé la société dans un bref communiqué. Son président Lukas Lundin a toutefois affirmé à un quotidien suédois que l'offre n'était pas la bienvenue et que la prime était beaucoup trop basse.

Le titre de Lundin (LUN) a bondi de 18,6% à la Bourse de Toronto, clôturant à 7,65$. Le titre d'Equinox (EQN) a perdu 8,6%, à 5,73$, tandis que celui d'Inmet (IMN) a retraité d'un peu plus que 0,7%, à 66,81$.

En conférence téléphonique hier, le président et chef de la direction d'Equinox, Craig Williams, a rappelé que sa société avait déjà mis la main sur l'australienne Citadel Resource Group pour 1,3 milliard, le mois dernier. Et la chasse aux occasions ne se termine pas avec Lundin, a-t-il ajouté. «cinq cent mille tonnes par année, ce n'est pas encore assez.»

Mais avec la dynamique actuelle de consolidation dans le secteur, UBS souligne que la société australienne pourrait elle-même faire l'objet d'une prise de contrôle à la suite de son offre pour Lundin.

------------------

Equinox Minerlas

Située à Perth, Australie

Capitalisation boursière de 4,1 milliards

Revenus (2009): 532 millions US

Exploite la mine de cuivre Lumwana, en Zambie, et possède le plus important gisement de cuivre d'Arabie Saoudite.

Production de cuivre (2009): 109 000 tonnes

Lundin Mining Corporation

Située à Toronto

Capitalisation boursière de 4,5 milliards. La famille suédoise Lundin est le principal actionnaire (24%).

Revenus (2010): 849 millions US

Produit du cuivre, du nickel, du plomb et du zinc au Portugal, en Espagne et en Suède. Possède une part de 24% dans Tenke Funfurume, un projet majeur de cuivre et cobalt en République démocratique du Congo.

Production de cuivre (2010): 80 000 tonnes

Inmet Mining Corporation

Située à Toronto

Capitalisation boursière de 4,1 milliards

Revenus (2009): 984 millions

Produit du cuivre et du zinc en Turquie, Espagne et Finlande. Développe la mine Cobre Panama.

Production de cuivre (2009): 83 600 tonnes