Le président de SNC-Lavalin (T.SNC), Pierre Duhaime, en a assez de la méfiance qui caractérise les relations entre les environnementalistes et les promoteurs de projets énergétiques.

«Qu'est-ce qu'on fait avec le cynisme et la méfiance qui dominent actuellement les débats sur l'énergie? Les gouvernements, les organisations non gouvernementales (ONG), l'industrie et le grand public se regardent avec suspicion», a déploré M. Duhaime mercredi, alors qu'il participait à une table ronde dans le cadre du 21e Congrès mondial de l'énergie, à Montréal.

«Notre société doit remplacer les discours creux et les campagnes de relations publiques par un dialogue patient et constructif entre les parties pour qu'on puisse en arriver à un véritable débat sur l'énergie», a-t-il ajouté.

Le résultat de la «mésentente» qui règne actuellement dans le domaine de l'énergie, c'est que l'humanité refuse de prendre les bonnes décisions pour l'avenir de la planète, a postulé Pierre Duhaime.

«La nature humaine étant ce qu'elle est, nous avons tendance à opter pour des solutions qui font porter le fardeau aux autres, a-t-il noté. Peu d'entre nous voulons vraiment que notre mode de vie change.»

Le dirigeant a proposé la mise sur pied d'un forum où les ONG, les gouvernements et le secteur privé pourraient échanger et en arriver à des «consensus» sur les façons acceptables de répondre à la demande croissante pour l'énergie. Selon lui, il serait plus facile de faire accepter à la population des solutions consensuelles.

Il a cité en exemple la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, une entité fédérale qui regroupe depuis 1988 entreprises, spécialistes et écologistes, mais dont le bilan des réalisations concrètes est toutefois mitigé.

SNC-Lavalin connaît bien la controverse qui vient souvent avec la mise en place de projets liés à l'énergie. Le géant québécois tire une grande partie de ses revenus et de ses profits des différents secteurs énergétiques, que ce soit le pétrole, le gaz, le nucléaire, l'éolien ou l'hydroélectricité.

Abordant les énergies vertes, M. Duhaime a avancé que le développement de celles-ci était moins une question de technologie que de ressources financières et de volonté politique. Lorsque les États-Unis ont voulu prendre part à la Deuxième Guerre mondiale et qu'ils ont souhaité aller sur la Lune, ils ont rapidement su trouver les moyens d'y parvenir, a-t-il illustré.

Délais trop longs

Or, même s'il s'est dit en faveur de l'expansion des énergies renouvelables, le pdg a déploré que l'approbation environnementale de certains projets dans les sables bitumineux de l'Alberta prenne jusqu'à sept ans.

Mais ce n'est pas tout: la firme d'ingénierie montréalaise trouve aussi que le processus décisionnel est trop lent dans sa province d'origine.

«C'est la même chose avec l'hydroélectricité au Québec: (les autorités) prennent une éternité à délivrer les permis, tant il y a de la méfiance entre les parties, a dénoncé Pierre Duhaime. Nous devons arrêter cela, nous devons trouver une façon d'obtenir plus de certitude (réglementaire) et plus d'efforts de coordination dans l'optique de développer nos secteurs énergétiques.»

M. Duhaime s'est par ailleurs inscrit en faux contre les subventions gouvernementales dont bénéficient les consommateurs de certaines formes d'énergie, sans préciser si ce commentaire visait le bloc d'électricité qui n'est pas vendu au prix du marché, au Québec.

«L'énergie doit être tarifée correctement, a-t-il dit. Les subventions destinées aux consommateurs faussent le débat et encouragent les comportements contre-productifs.»

Participant à la même discussion, Yvo De Boer, l'ancien grand responsable de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, a convenu que le monde ne pourrait pas se passer des énergies fossiles avant plusieurs décennies.

Il a fait remarquer que lui et le ministre canadien de l'Environnement, Jim Prentice, présent à ses côtés, portaient encore les «cicatrices» du sommet sur les changements climatiques de Copenhague, qui s'est terminé en décembre 2009 sans accord contraignant sur les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

M. De Boer a tout de même attiré l'attention sur le fait que la plupart des pays du monde ont signifié leur intention d'abaisser leurs émissions au cours des prochaines années.

Pour sa part, la présidente du groupe nucléaire français Areva, Anne Lauvergeon, a révélé qu'elle n'était pas intéressée par le rachat d'Énergie atomique du Canada (AECL), que le gouvernement conservateur a mis en vente en décembre dernier.

Mme Lauvergeon a toutefois indiqué qu'Areva était ouvert à un «partenariat» avec AECL, sans en préciser la nature. Les deux entreprises n'exploitent pourtant pas la même technologie nucléaire.

SNC-Lavalin a pour sa part montré son intérêt pour AECL.

L'action de SNC-Lavalin a clôturé à 49,89 $ mercredi, en baisse de 0,2 pour cent, à la Bourse de Toronto.