Les Cantons-de-l'Est pourraient devenir un leader canadien dans la production de biodiesel, un carburant en croissance au Canada qui est considéré comme moins polluant que l'éthanol.

Le gouvernement fédéral a annoncé hier une subvention de près de 19 millions sur sept ans à Biocardel, une petite entreprise de Richmond qui produit du biodiesel à partir d'huiles usées de cuisson, comme l'huile de frites, et de graisses animales recyclées.

Biocardel pourrait produire annuellement 40 millions de litres de biodiesel d'ici cinq ans. Il s'agit d'une quantité considérable, compte tenu de la production canadienne actuelle, qui oscille autour de 150 millions de litres par année.

«Cette subvention du programme écoÉNERGIE va nous permettre d'augmenter notre production et d'arriver à vendre notre biodiesel, d'ici sept ans, au prix du marché sans l'aide du gouvernement, explique le président de Biocardel, René Delarue. On espère créer environ 50 emplois grâce à cette aide.»

Le ministre fédéral des ressources naturelles, Christian Paradis, a fait l'annonce lors du Congrès mondial de l'énergie, à Montréal. Il a rappelé que son gouvernement entend rendre obligatoire un minimum de 2% de biodiesel dans le carburant diesel d'ici 2011. Ottawa va aussi exiger d'ici quelques semaines que l'essence contienne un minimum de 5% d'éthanol, un carburant fait à partir de céréales.

Mais tandis que la production d'éthanol est remise en question par plusieurs ONG et spécialistes qui estiment qu'elle aggrave la crise alimentaire mondiale, le biodiesel à base d'huiles usées suscite moins de réserves.

«Règle générale, le biodiesel se compare avantageusement à l'éthanol au niveau environnemental, confirme Guy Debailleul, professeur titulaire au département d'économie agroalimentaire de l'Université Laval. Surtout le biodiesel fait à partir d'huiles usées, huiles dont la fonction alimentaire a été remplie. C'est une forme de recyclage.»

Rentables, les biocarburants?

Établie en 2008, l'usine de Richmond devait au départ produire du biodiesel à partir d'huiles végétales neuves. La baisse du prix du pétrole a toutefois rendu ce projet déficitaire.

René Delarue s'est alors tourné vers les huiles usées. Le prix de celles-ci a toutefois connu lui aussi une importante hausse. «Il y a 10 ans, c'était de la scrap, les gens payaient pour s'en débarrasser, rappelle M. Delarue. Aujourd'hui, c'est une commodité. Il y a beaucoup de demande.»

Il explique que même si le prix des huiles usées est le tiers moins cher que celui des huiles neuves, l'aide d'Ottawa était essentielle.

«Les huiles usées coûtent actuellement 62 cents le litre, il faut ajouter 10 cents du litre en méthanol et autres produits chimiques nécessaires, plus l'amortissement, la main-d'oeuvre, etc. Le total revient plus cher que ce qu'on touche en vendant le biodiesel», affirme M. Delarue.

Il espère que l'obligation d'inclure 2% de biodiesel dans le diesel, comme Ottawa entend le faire, «va assurer des ventes». Il croit aussi que l'aide du gouvernement va permettre à Biocardel d'augmenter sa productivité afin de rendre l'entreprise rentable sans aide étatique.

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