Canadian Hydro Developers, entreprise de l'Alberta qui a dépensé 120 millions de dollars pour faire l'acquisition du parc éolien Le Nordais, en Gaspésie, est convaincue de s'être fait flouer et réclame 8 millions à l'ancien propriétaire du parc, le Groupe Axor.

Turbines hors d'usage, pales fissurées, fuites d'huile qui ont contaminé les terrains depuis des années, l'acheteur s'est aperçu qu'il avait acheté une minoune, révèle une poursuite déposée en Cour supérieure contre le Groupe Axor est ses entreprises affiliées, Matcap et Énergie Le Nordais.

Le parc éolien Le Nordais est le plus ancien des parcs éoliens du Québec. Il regroupe 132 éoliennes à Matane et à Cap-Chat, dont l'électricité est vendue à Hydro-Québec en vertu d'un contrat valide jusqu'en 2033.

Ce contrat était d'ailleurs le principal attrait pour un acheteur, puisqu'il assure des revenus garantis sur une longue période. Le parc, qui a toujours produit moins d'électricité que sa capacité, avait coûté 160 millions à construire en 1999. Il a été vendu à Canadian Hydro Developers, rachetée depuis par TransAlta, pour 120,7 millions en 2007.

Après avoir pris possession de son bien, l'acheteur s'est aperçu que 42 des 132 machines n'étaient pas en état de fonctionner et a constaté que d'autres qui avaient supposément été réparées sont tombées en panne peu après avoir changé de propriétaire. De l'huile avait fui de plusieurs autres turbines, en quantité suffisante pour qu'une décontamination des sols environnants soit nécessaire.

Canadian Hydro Developers a aussi remarqué des fissures dans les pales du tiers des éoliennes et plusieurs autres problèmes liés à la sécurité, comme l'absence de feux de position pour les avions et une défectuosité des disjoncteurs requis par Hydro-Québec.

L'acheteur en est venu à la conclusion que le vendeur n'a pas négocié de bonne foi et qu'il lui a caché le véritable état de l'entreprise dans le but d'en obtenir un meilleur prix.

Aucun commentaire n'a pu être obtenu de la part du Groupe Axor, dont le siège social est à Montréal.

Ce litige au sujet du plus ancien parc éolien du Québec pourrait bien se reproduire à mesure que les autres parcs vieilliront, estime le professeur Jean-Louis Chaumel, spécialiste de l'industrie éolienne de l'Université du Québec à Rimouski.

«Un parc éolien vieillit et il a besoin d'entretien. Les promoteurs sont tentés de vendre une fois qu'ils ont fait leur argent», explique-t-il.

Trompés

Avant de conclure la transaction, Canadian Hydro Developers dit avoir posé toutes les questions qu'il fallait sans obtenir les réponses. Préoccupé par une baisse de la production d'électricité, l'acheteur s'est fait répondre qu'elle s'expliquait par une baisse du régime des vents et par le programme de réparation en cours.

Il affirme avoir été trompé au sujet de ces travaux de maintenance qui n'ont jamais été faits et de la contamination des terrains, qui n'a jamais été mentionnée.

Les dirigeants de Canadian Hydro Developers soutiennent aussi que, lors de leur visite des lieux, les employés du parc, à la demande de leur patron, avaient fait fonctionner manuellement des éoliennes qui n'étaient pas en état normal de marche. Les employés avaient aussi reçu l'ordre d'éloigner les acheteurs éventuels des éoliennes défectueuses ou auxquelles il manquait des pièces, affirment-ils dans leur poursuite.

Plutôt que de pouvoir exploiter immédiatement son nouveau parc éolien, Canadian Hydro Developers soutient avoir dû réparer et remplacer plusieurs pièces, dont 312 pales qui lui ont coûté 1,3 million.

Au total, la filiale de TransAlta affirme avoir dépensé près de 8 millions pour remettre le parc en état de fonctionnement et c'est cette somme qu'elle réclame à Axor et deux entreprises affiliées, Matcap Services et Énergie Le Nordais.