Au Canada, une entreprise peut émettre autant de gaz à effet de serre qu'elle le veut sans payer un cent de pénalité. Et le ministre canadien de l'Industrie, Tony Clement, reconnaît que cela freine la croissance de l'industrie des technologies vertes.

M. Clement participait hier à Ottawa au tout premier sommet canadien sur les technologies propres, un secteur en plein essor qui peine cependant à décoller au Canada.

Interrogé par La Presse Affaires pour savoir si l'absence d'un prix sur le carbone pouvait ralentir l'émergence de l'industrie verte au pays, M. Clement a répondu par l'affirmative.

«Bien sûr. C'est la raison pour laquelle nous travaillons avec les Américains sur la question. Il ne sert à rien d'avoir un prix sur le carbone canadien et un prix américain. Instaurons un prix sur le carbone continental», a-t-il répondu, se défendant d'être ainsi à la remorque du gouvernement Obama.

«Nous sommes opposés à une taxe sur le carbone qui toucherait les consommateurs, a-t-il précisé. Mais, du côté industriel, oui, il faut aller vers un système de plafond et d'échanges qui fixerait un prix sur le carbone.»

Le fait qu'aucun plafond ne soit imposé aux entreprises canadiennes est désigné par l'industrie verte comme l'un des principaux obstacles à sa croissance. En Europe, les grands émetteurs de carbone sont obligés de réduire leurs émissions ou d'acheter des crédits pour les compenser, ce qui stimule la croissance des technologies vertes et l'essor des bourses du carbone.

Céline Bak, cofondatrice de la firme de consultants The Russell Mitchell Group, croit aussi que l'industrie canadienne est à un tournant. Mme Bak a dévoilé hier le premier portrait de l'industrie canadienne des technologies propres.

On en retient l'image d'une industrie foisonnante formée de 436 entreprises, mais dont la vaste majorité peine à atteindre une taille intéressante.

«On a un peu la «maladie des patenteux»; nous sommes forts en innovation, mais faibles en commercialisation», constate Mme Bak.

Pour elle, le fait que le Canada ne soit pas lui-même un consommateur de technologie verte prive les entreprises locales d'un marché naturel. Elle pointe le gouvernement américain, qui s'approvisionne auprès des entreprises en démarrage, comme l'exemple à suivre.

«C'est peut-être un peu provocateur, mais j'ai l'impression que notre gouvernement préfère acheter d'IBM plutôt que de nos petites entreprises technologiques. Or, il devrait peut-être acheter de nos entreprises avant qu'IBM ne les achète!»