AbitibiBowater se prépare à démanteler en catimini la papetière de Dolbeau-Mistassini, selon le Comité complexe forestier intégré.

Les membres de ce comité ont été informés qu'une lettre interne de la haute direction d'AbitibiBowater signifiait aux directions des usines du groupe d'aller visiter les installations de la papetière de Dolbeau-Mistassini et de choisir les équipements qui les intéressaient.

«La semaine du 3 mai est retenue comme date d'attribution de ces actifs», peut-on lire dans un communiqué dénonçant la situation.

Il y a un mois, «Le Quotidien» avait rapporté qu'AbitibiBowater avait décidé du sort de la papetière et qu'une fermeture définitive ou un démantèlement était imminent.

La compagnie a confirmé l'existence de ce mémo. «L'invitation touche aussi d'autres installations fermées pour une période indéterminée. Il s'agit d'une procédure que nous avons déjà utilisée dans le passé pour d'autres usines comme Beaupré», a expliqué le porte-parole d'AbitibiBowater, Pierre Choquette. L'usine de Beaupré, fermée elle aussi pour une période indéterminée, a été mise en vente. Des travailleurs se sont opposés récemment à ce démontage.

Pierre Choquette a assuré qu'il ne s'agit pas d'un démantèlement déguisé. «Dans le cadre de la restructuration, si les usines peuvent économiser en se procurant des pièces et de petits équipements dans celles qui ne sont pas en opération, c'est normal. On ne parle pas de sortir les machines de l'usine. Nous n'avons pas changé de statut pour la papetière de Dolbeau-Mistassini. Nous continuons à préparer notre plan de rationalisation. Nous rencontrerons les gens concernés, si des décisions sont prises», a-t-il ajouté.

<b>Réactions</b>

Le président du Comité complexe forestier intégré et maire de Dolbeau-Mistassini, Georges Simard, est furieux. «C'est l'insulte suprême! Je suis toujours resté poli, mais là leur façon de faire démontre à toute la population régionale que cette compagnie n'a aucune considération pour nous. Ils n'ont même pas le respect de nous aviser. C'est inqualifiable!», a-t-il exprimé.

Il a exigé une rencontre avec le président David Peterson et la haute direction. «Il est notre seul espoir. Lui au moins, il a déjà visité l'usine. J'espère qu'il comprendra l'importance de la papetière et du projet de complexe intégré», a-t-il lancé.

Georges Simard a aussi demandé au gouvernement du Québec d'intervenir pour empêcher ce démantèlement. «Il faut que Nathalie Normandeau (ministre des Ressources naturelles) mette un frein à leur façon de faire. Cette compagnie coupe le bois de notre forêt, mais le transforme ailleurs. On ne veut pas mourir à cause de leur mauvaise gestion», a-t-il clamé.

Le préfet de la MRC Maria-Chapdelaine, Jean-Pierre Boivin, a aussi déploré la méthode employée par la multinationale. «C'est très surprenant comme façon de faire. Habituellement, il procède à une fermeture définitive avant de commencer un démantèlement. Nos informations sont suffisamment solides pour déplorer la situation dans les médias. Il y a même des rendez-vous qui sont pris», a-t-il mentionné.

Ce dernier a fait appel à la solidarité régionale dans cette affaire. «Je demande aux directions des usines d'Alma et de Kénogami de ne pas se présenter à Dolbeau-Mistassini et encore moins de prendre des équipements de l'usine. Nous sommes comme des frères de sang dans cette histoire. Déjà que nos copeaux servent à ces usines, ça serait le «boutte» s'ils venaient chercher des équipements», a-t-il soutenu.

Le député péquiste, Denis Trottier, a condamné la façon de faire d'AbitibiBowater. «C'est choquant, car les gens sont les derniers informés alors qu'ils sont les premiers concernés. Ce n'est pas acceptable», a-t-il critiqué.

Il a écorché au passage le gouvernement «qui n'a rien fait pour soutenir l'industrie forestière». «On ferme des usines et il n'y a pas de programme dans le dernier budget pour des projets de reconversion de papetière comme Dolbeau. Ce sont des centaines d'emplois spécialisés que l'on perd. Des gens qui déménagent dans les grands centres», a-t-il déploré.