Durement frappées par la crise financière, les petites sociétés d'exploration minière ont vu leur capitalisation boursière s'effondrer et leur capacité à se financer en a sévèrement pâti. Si les signes encourageants s'accumulent désormais dans le secteur minier mondial, les explorateurs pourraient devoir se montrer patients avant de voir les investisseurs revenir à eux.

«Après avoir vu les prix s'éroder si rapidement et de manière si généralisée en 2008 et 2009, ça pourrait prendre du temps avant que les investisseurs se sentent à l'aise d'investir de nouveau dans les sociétés d'exploration», conclut la firme PricewaterhouseCoopers (PWC) dans un rapport sur les tendances des petites minières canadiennes en 2009.

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«C'est toujours comme ça que ça fonctionne, dit Claude St-Jacques, président de la Société d'exploration minière Vior. Ça commence par les plus grands joueurs, puis les moyens, puis ça vient à nous.»

La grande question, c'est: quand cela se produira-t-il? «Je ne sais pas, votre avis vaut le mien», répond M. St-Jacques, dont la société est obligée de se financer entre-temps par l'entremise de débentures et de royautés éventuelles associées à son projet de production d'or en Abitibi.

Valeur en baisse et radiations

Du 30 juin 2008 au 30 juin 2009, la capitalisation boursière globale des 100 plus importantes minières cotées au TSX Croissance (dont 71 sociétés d'exploration) est passée de 18,1 à 8,6 milliards.

«Certains investisseurs ont accepté de miser sur les sociétés de production et de mise en valeur, mais les sociétés d'exploration ou les autres sociétés qui représentaient un risque plus élevé ont été laissées pour compte», explique Nochane Rousseau, associé et responsable du secteur minier québécois à PWC.

Au-delà des chiffres, il y a des conséquences majeures. Beaucoup de sociétés ont été incapables d'obtenir un financement suffisant sur le marché des actions compte tenu de la baisse de valeur des titres. Si le titre est trop bas, une émission d'actions risque d'entraîner une trop forte dilution et susciter la colère des actionnaires.

«Il faut dire que certains investisseurs sont là, ils savent que c'est le temps d'acheter et que le marché est prometteur, dit Marie-José Girard, présidente et chef de la direction de Dios Exploration. Mais je me suis donné comme consigne de ne jamais émettre d'actions à des prix plus bas qu'auparavant, pour protéger mes actionnaires.»

Dios a eu le luxe d'entamer la crise avec plusieurs millions dans les coffres. Mais le manque de financement a forcé beaucoup d'autres sociétés à mettre leurs projets sur la glace, voire à les abandonner. Les dépenses d'exploration ont baissé de 24% dans les sociétés qui s'y spécialisent. Le nombre de radiations, de propriétés et de projets a été multiplié par 10, rien de moins.

Depuis le 30 juin 2009, le TSX Croissance, composé pour la moitié de sociétés minières, a repris près de 43%.

La montée du prix de l'or est aussi venue donner un peu d'air à plusieurs sociétés de développement et de production. Mais les explorateurs attendent toujours que la vague de la remontée les rattrape.

Pourtant, les perspectives du secteur minier sont bonnes. La demande mondiale ira en s'accroissant. Et, selon PWC, «il y a en Amérique du Nord une réserve d'argent qui attend sur les lignes de côté, et qui pourrait relancer le secteur».

Mais les investisseurs restent encore prudents à l'égard des projets qui n'offrent pas de résultats immédiats, précise PWC.

«Sur le marché de la spéculation, c'est mort, confirme Claude St-Jacques, président de la Société d'exploration minière Vior. On le voit dans les titres, dont beaucoup restent inférieurs à 20 cents même si les sociétés ont de bonnes propriétés.»

Selon PWC, le marché minier «junior» restera extrêmement volatil, en 2010 et au-delà. La firme estime que les sociétés d'exploration devront afficher la même prudence que Marie-José Girard et Claude St-Jacques, et éviter de se financer sur le marché à des prix trop bas.