Alors que le monde sort de la crise, l'industrie pétrolière a appelé mardi les gouvernements à jouer un rôle de premier plan, à la fois dans la lutte contre le réchauffement climatique et dans la régulation du marché pétrolier, dont elle a dénoncé l'excessive volatilité.

«La transition vers des économies émettant peu de CO2 ne va pas se produire du jour au lendemain. Les gouvernements doivent y prendre une part plus active», a affirmé mardi Tony Hayward, patron du géant pétrolier britannique BP, lors de la conférence Oil & Money organisée à Londres par le International Herald Tribune.

«Nous avons besoin d'une coopération sans précédent entre les gouvernements et l'industrie pétrolière», a-t-il ajouté, à moins de deux mois du sommet sur le climat de Copenhague.

Un avis partagé par Nobuo Tanaka, directeur général de l'Agence internationale de l'énergie. «Consommateurs et producteurs (de pétrole) doivent coopérer pour que le scénario de 450 pppm (parties par million) se réalise.»

Ce scénario limitant la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère permettrait, selon les scientifiques, de limiter la hausse de la température mondiale à + 2 degrés.

Paolo Scaroni, directeur général du groupe pétrolier italien Eni, juge lui aussi que les pays consommateurs devaient opter pour des mesures contraignantes, comme des taxes sur le carbone, plutôt que de se reposer sur le marché des quotas de carbone.

«Les taxes sur le carbone sont plus faciles, plus simples à mettre en oeuvre», estime-t-il, ajoutant que le plus grand chantier pour les gouvernements était de promouvoir les économies d'énergie.

Les gouvernements ont également été invités à prendre des mesures pour juguler l'extrême volatilité des prix du pétrole, nuisible à la fois aux consommateurs et aux producteurs.

Montés en flèche à près de 150$ à l'été 2008, les cours du brut se sont ensuite écroulés jusqu'à près de 30$ en décembre dernier. Mardi dans la nuit, il a brièvement fait une pointe au-dessus de 80$.

«Le problème de la volatilité des prix est qu'il rend la planification des investissements très difficiles», a rappelé Choukri Ghanem, ancien ministre du pétrole libyen.

«Il faut enrayer la spéculation excessive», a martelé le secrétaire général de l'Organisation de pays exportateurs de pétrole (Opep).

Selon lui, la tâche de réduire la volatilité des prix «est entre les mains des pays producteurs».

Le régulateur américain des matières premières (CFTC) s'est attelé à cette tâche cet été. Il envisage notamment d'imposer des limites de positions sur le marché pétrolier de New York.

Pour Nobuo Tanaka, qui représente les intérêts énergétiques des pays industrialisés, les pays consommateurs ont aussi un rôle à jouer dans la stabilisation des prix en «soulageant la pression sur la demande» par des économies d'énergie et une diversification de leurs sources d'énergie.

Quant aux producteurs, ils peuvent contribuer à stabiliser les prix par leurs investissements, selon lui.

Christoph Rühl, économiste en chef de BP, estime toutefois qu'il est «hautement improbable» que l'on assiste à une flambée des prix du pétrole dans les prochaines années, en raison des énormes capacités de production actuellement en sommeil, de 6 millions de barils par jour selon son estimation.

Les prix devraient connaître de très violentes fluctuations de prix dans les prochaines années, objecte Jeffrey Currie, analyste chez Goldman Sachs. Selon lui, le prix du baril devrait atteindre 95$ dès la fin de l'année prochaine.