Les prix du pétrole ont dégringolé de plus de 4% jeudi à New York, au lendemain d'une chute d'une ampleur similaire, plombés par un rebond de la monnaie américaine, sur un marché saisi de doute quant à la reprise de l'économie.

Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de «light sweet crude» pour livraison en novembre a terminé à 65,89$, en recul de 3,08$ par rapport à la clôture de mercredi.

Il accumule un plongeon de 5,87$ sur les deux dernières séances, soit plus de 8%.

À Londres, sur l'InterContinentalExchange, le baril de Brent de la mer du Nord à échéance identique a chuté de 3,17$ à 64,82$.

«Il semble que l'argent afflue hors des matières premières, a observé Ellis Eckland, courtier indépendant. Les investisseurs veulent atteindre la sortie au plus vite, ils ont le sentiment que l'économie reste faible.»

Le marché pétrolier suivait le chemin tracé par Wall Street, qui baissait pour le deuxième jour d'affilée, en réaction à un indicateur immobilier plus mauvais que prévu aux États-Unis.

Le mouvement de recul de Wall Street a aussi eu pour conséquence un fort rebond du dollar, qui avait plongé ces dernières semaines pour toucher mercredi son plus bas niveau depuis un an aux États-Unis.

Une appréciation de la monnaie américaine rend moins attractif le brut, vendu en dollars, pour les acheteurs munis d'autres devises.

«Le sentiment a changé, alors que le scepticisme quant à la vigueur de la reprise monte», a estimé Mike Fitzpatrick, de MF Global.

Les cours du brut restaient en outre plombés par les «terribles» statistiques diffusées mercredi sur l'évolution des réserves pétrolières américaines, selon M. Eckland.

Les stocks de brut, qui étaient attendus en baisse, ont gagné 2,8 millions de barils la semaine dernière, et les réserves d'essence se sont étoffées de 5,4 millions de barils, presque dix fois plus qu'attendu.

Les produits distillés, qui comprennent le fioul de chauffage et sont donc de plus en plus surveillés à l'approche de l'hiver en Amérique du Nord, ont gagné 3 millions de barils. Ces réserves sont au plus haut depuis 26 ans.

Les analystes ont également été déçus par les chiffres de la demande des Américains.

«Il est difficile de réconcilier cette image d'une demande qui se creuse avec l'idée d'une reprise naissante du commerce international, du marché immobilier et de l'économie en général», a estimé Antoine Halff, de Newedge Group.

Pour l'analyste cependant, «la volatilité de ces statistiques devrait demeurer pour encore un temps et il est conseillé de les interpréter avec prudence».

Selon Ellis Eckland, les investisseurs se montrent inquiets que la banque centrale américaine (Fed) n'arrête d'alimenter en liquidités les marchés, ce qui tarirait le flot d'argent qui avait permis aux marchés financiers de rebondir depuis six mois.

La Fed a en effet annoncé qu'elle réduisait l'ampleur de deux de ses facilités d'extension de liquidités au système bancaire au vu de «progrès continuels» observés sur les marchés financiers.

«Je ne pense pas que (les cours du brut) sont en position de baisser encore beaucoup, je pense que l'on va se stabiliser», a cependant estimé le courtier.

«Le marché pétrolier n'est pas dans un état si terrible que cela: les stocks ont reculé pendant l'été et la production industrielle s'est stabilisée dans le monde», a-t-il ajouté.