Le voeu de l'Opep, qui souhaite un baril de pétrole à 75 dollars, est en passe d'être exaucé : celui-ci a repassé vendredi la barre des 70 dollars, à la faveur d'indicateurs suggérant que la reprise est en vue et d'une faiblesse prononcée du dollar, un environnement où les spéculateurs affluent de nouveau.

Alors que le pétrole taquinait déjà la veille les 70 dollars, le rapport sur l'emploi américain, indicateur phare pour l'économie mondiale, lui a donné l'élan nécessaire pour la sauter vendredi.

Quelques minutes après l'annonce d'un ralentissement plus marqué que prévu des pertes d'emplois américaine, le cours du «light sweet crude» coté à New Yor a grimpé jusqu'à 70,32 dollars, son cours le plus haut depuis le 4 novembre.

En cinq semaines, l'or noir a cumulé ainsi un gain de 19 dollars, plus d'un tiers (36%) de sa valeur.

Spectaculaire, cette progression n'est pas liée à un redémarrage très net de la demande ni à une forte baisse des stocks. Les réserves américaines de brut ont même rebondi cette semaine, alors qu'elles avaient ébauché une décrue début mai.

Elle tient davantage à la nouvelle atmosphère qui semble s'être installée sur le marché pétrolier: voyant se multiplier les «bourgeons de la reprise», les spéculateurs affluent de nouveau. Ils parient que le redressement économique va relancer la demande et éponger les surplus de stocks qui se sont accumulés au plus fort de la crise.

«Accompagnant la transition de l'environnement macroéconomique, le marché pétrolier évolue vers une période de transition, composée d'une demande qui s'améliore graduellement, de stocks en baisse, et de prix s'approchant de la fourchette désirée par les grands producteurs, dans la région des 75-85 dollars», jugent ainsi les analystes de la banque Barclays Capital.

Un premier virage avait été amorcé lors la réunion de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, le 28 mai à Vienne. L'organisation a maintenu ses niveaux de production (à 24,84 millions de barils par jour) et exprimé sa confiance dans le fait que les prix allaient continuer à progresser pour atteindre les 75 dollars, le prix qu'elle ne cesse de défendre depuis l'été dernier.

Jeudi, la banque américaine Goldman Sachs lui a involontairement, prêté main forte en pronostiquant que le baril atteindrait 85 dollars d'ici 2009 et tournerait autour de 75 dollars -- la cible de prix de l'Opep -- dans les trois prochains mois.

Ses analystes font autorité pour avoir annoncé les premiers, dès 2005, un baril au dessus de 100 dollars, une prédiction réalisée moins de trois ans plus tard.

Pour un horizon plus lointain (fin 2010), ils ont même évoqué le spectre de pénuries d'énergie, une hantise qui avait fortement contribué à la flambée des cours du brut un an plus tôt, jusqu'à 147,50 dollars en juillet.

Les investisseurs semblent s'être donc convaincus que la page de l'hiver dernier --quand les cours s'étaient écroulés jusqu'à 32 dollars-- est tournée pour de bon et qu'avec la reprise, les cours du brut ne vont plus cesser de s'apprécier.

Autre élément essentiel du décor pétrolier : le dollar s'est sensiblement affaibli depuis la mi-avril, passant de quelque 1,28 euro pour un dollar jusqu'à 1,4338 cette semaine, soit une chute de 12%. Sa dépréciation attise les craintes inflationniste, poussant les investisseurs à acheter des matières premières comme placement anti-inflation.