La mégatransaction avec la société chinoise Chinalco, qui devait soulager Rio Tinto (rtp) de sa lourde dette, ne se fera pas. Annoncée en primeur par le Financial Times de Londres, la nouvelle a reçu une sorte de confirmation de Rio Tinto plus tard hier dans la journée.

Le géant minier a publié un communiqué qui ne fait aucune mention de la transaction, ni de Chinalco. «Rio Tinto poursuit une série d'options, dont certaines sont assez avancées, pour maximiser la valeur pour les actionnaires et améliorer sa structure de capital», a fait savoir l'entreprise, qui ajoute qu'une annonce sera faite «en temps utile».Pour la plupart des analystes, ce bref message signifie la mort de la transaction conclue au pire de la crise du crédit et alors que les prix des métaux étaient au plus bas. Chinalco avait accepté d'investir 19,5 milliardsUS, ce qui lui aurait donné 18% des actions de Rio Tinto et des participations variant entre 15 et 50% dans plusieurs projets miniers en Australie.

Controverse

Dès son annonce, le 12 février dernier, la transaction avait soulevé la controverse. Le gouvernement australien, où se trouve un des deux sièges sociaux de Rio Tinto (l'autre est à Londres), s'était inquiété de voir une société appartenant à la Chine, déjà un important client de Rio Tinto, devenir un des principaux actionnaires de l'entreprise dans un secteur aussi névralgique pour l'Australie que les mines.

Les actionnaires de Rio Tinto s'inquiétaient eux aussi de voir leur participation diluée par Chinalco, qui aurait acheté ses actions à rabais.

La direction de Rio Tinto a travaillé très fort pour défendre la transaction, jusqu'à tout récemment, alors qu'il devenait de plus en plus évident que les termes de l'entente conclue avec les Chinois devaient être renégociés.

Les actions de Rio Tinto se sont en effet appréciées de près 50% depuis février, ce qui rendait la transaction avec Chinalco de moins en moins acceptable pour les actionnaires. «À mesure que l'action montait et que les conditions de crédit s'amélioraient, d'autres options commençaient à paraître beaucoup plus intéressantes», a commenté l'analyste londonien Nick Hatch, d'ING, à Bloomberg.

Les autres options envisagées par Rio Tinto étaient la vente d'éléments d'actif et, surtout, une émission d'actions de 10 à 15 milliards US. Ce plan B, qui apparaissait impossible à mettre en oeuvre en février dernier, est devenu réalisable avec l'amélioration des conditions du marché et le raffermissement du prix des métaux.

Selon le Financial Times, Rio Tinto annoncera dans les prochaines heures qu'elle a choisi d'aller chercher du capital en Bourse et de s'allier avec son concurrent BHP Billiton, qui prendrait les participations dans les projets miniers australiens qui étaient destinés à Chinalco.

Ni Chinalco ni BHP Billiton n'ont commenté hier. Le titre de Rio Tinto a chuté de 6,6% et celui de BHP Billiton a baissé de 2,5% hier sur les marchés de Londres et de Melbourne.

Rio Tinto doit impérativement réduire sa dette de près de 40 milliards US contractée principalement lors de l'achat d'Alcan conclu juste avant que le marché des métaux ne s'effondre.

Si la transaction avec Chinalco est abandonnée, Rio Tinto devra verser une compensation estimée à 195 millionsUS au gouvernement chinois. Mais ce qui risque de faire le plus mal à Rio Tinto, c'est la frustration des Chinois qui restent les principaux consommateurs de métaux sur la planète.