L'été tire à sa fin et avec lui sonne pour plusieurs le retour au travail. Mais voilà, un employé à peine rentré demande des congés supplémentaires. Ses raisons: il veut partir à l'aventure, retourner aux études ou rester plus longtemps avec son nouveau-né. Comment gérer cette situation?

Stéphanie Fissette, analyste pour le Réseau de veille en tourisme et conseillère en ressources humaines agréées (CRHA), connaît bien la situation. Gestionnaire durant quatre ans pour une entreprise du secteur touristique, elle a eu à faire face à ces demandes à maintes reprises. «Au départ, je disais non à tous les congés. Selon moi, un employé devait respecter son contrat. Je me suis vite rendu compte que je faisais fausse route. Au final, la personne finissait par partir quand même. Si elle restait, elle était démotivée.»

C'est à la suite d'une formation qu'elle a réalisé que la meilleure manière d'agir est d'être flexible. Une notion qu'encore trop peu d'entreprises, selon elle, ont intégrée dans leur gestion. Plusieurs raisons l'expliquent. «Il y a la pensée que c'est compliqué de répondre aux demandes particulières des employés. La peur aussi de créer des précédents et le choc des valeurs. Mais la société a changé et les gens veulent avoir une vie. La famille, les amis, les voyages passent avant.»

Francine Sabourin, directrice, développement de la profession, à l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés et CRHA, voit plusieurs points positifs à dire oui aux demandes de congés supplémentaires. «S'il y a demande, c'est qu'il y a besoin. Alors, pourquoi dire non quand c'est possible? Si ce ne l'est pas, il faut avoir une raison et les employés comprennent si on la leur explique. Une chose est certaine: répondre positivement est payant. On retrouve à son retour un travailleur plus reposé et plus productif.»

Une plus grande flexibilité aurait aussi pour effet d'augmenter la motivation et la fidélisation, de créer un sentiment de valorisation, de réduire le taux de roulement et d'entraîner un pouvoir d'attraction plus grand. «Un employeur compréhensif va avoir des employés qui vont lui donner tout autant en retour. Au contraire, quelqu'un qui n'est pas heureux va partir. Cette perte d'expertise a un coût que l'on évalue en moyenne à 10 000$ puisque l'on doit reformer un nouveau travailleur et ce dernier, au départ, ne sera pas aussi productif que celui que l'on vient de perdre», souligne Stéphanie Fissette.

Des solutions à portée de la main



Certaines sociétés comme Netflix, IBM et Virgin ont poussé très loin le concept de flexibilité en allant jusqu'à offrir des congés illimités à leur personnel. Ici, l'idée n'a pas encore fait son chemin et serait difficilement applicable en raison de la réalité des entreprises. Sans aller aussi loin, quelques solutions simples sont à portée de la main.

Depuis 1998, Patrice Deschamps, propriétaire d'une clinique de denturologie et enseignant au cégep Édouard-Montpetit, participe à un programme qui permet aux employés de prendre congé plusieurs semaines sans voir leur salaire touché. Le principe est simple, l'employé autofinance ses congés en ne recevant lorsqu'il travaille qu'une partie de son salaire. Lorsqu'il part durant un trimestre, ses collègues prennent alors le relais. «Cela convient à tout le monde. Le cégep ne débourse pas un sou et mes collègues, qui n'ont pas de tâche pleine, ont ainsi la chance de travailler davantage.»

Stéphanie Fissette croit que l'apport des collègues peut être une bonne façon de gérer cette situation. «On peut déléguer cette responsabilité aux équipes de production. L'équipe gère le calendrier de vacances, et non le cadre. Cela génère de la responsabilisation chez les employés.»

Autres solutions: offrir la possibilité d'échanges de temps, aménager les horaires ou embaucher des employés de différents groupes d'âge. «Les gens de 55 ans et plus n'ont pas les mêmes besoins que quelqu'un de 25 ans. Ils ne partiront pas au même moment.» Au moment de l'embauche, s'informer des projets du candidat est également une façon de prévenir les coups.

Des règles à suivre



En tant qu'employé, mais aussi employeur, Patrice Deschamps est bien conscient qu'il y a des règles à respecter pour que des congés supplémentaires accordés ne deviennent pas un cauchemar pour une entreprise. Selon lui, il est important de mettre des limites. «Il faut être à jour dans ses projets et s'assurer de ne pas nuire à son équipe. On doit aussi être conscient des besoins de l'entreprise et respecter ses disponibilités. Par exemple, dans mon cas, il serait déraisonnable de partir six mois.»

Francine Sabourin suggère aux gens qui désirent faire ce genre de demande de bien se préparer avant de se présenter devant leur patron. «Il faut bien comprendre que ce n'est pas un droit acquis et on doit être prudent pour ne pas créer de l'injustice. On peut proposer de combler le manque par du télétravail ou avoir une liste de personnes qui pourront reprendre nos tâches. Tout se négocie, des congés supplémentaires aussi.»