La Coupe du monde de la FIFA se mettra en branle demain au Brésil et se poursuivra jusqu'au 13 juillet. Les amateurs du ballon rond qui ne veulent pas manquer une seule confrontation auront toutefois de la difficulté à conjuguer travail et sport de salon. Comment les employeurs doivent-ils réagir? La Presse a préparé un petit mode d'emploi à leur attention.

Q Les employeurs devraient-ils s'adapter à la Coupe du monde?

R La réponse est nuancée, selon Julie Carignan, psychologue organisationnelle et associée chez SPB Psychologie organisationnelle. «L'employeur a toujours avantage à se montrer flexible quand il le peut. Par contre, certains environnements de travail ne permettent tout simplement pas ce genre d'accommodement», dit-elle.

«Pour les compagnies qui donnent déjà beaucoup de liberté à leurs employés, comme c'est souvent le cas pour les entreprises technos où les heures ne sont pas comptées et où la table de baby-foot trône dans le bureau, c'est beaucoup plus facile de s'adapter», croit Manon Cléroux, consultante, coach et formatrice au Réseau DOF. Après tout, quelle différence entre jouer une partie de baby-foot et regarder la rencontre entre l'Allemagne et le Portugal?

Q Quels accommodements peuvent faire les employeurs?

R Pas besoin de fermer boutique tous les après-midi pendant le mois que dure la Coupe du monde! À chaque entreprise sa solution. Certaines entreprises pourraient notamment être plus tolérantes sur l'usage des réseaux sociaux, d'autres pourraient permettre le télétravail lors de parties importantes, tandis que les plus permissives pourraient modifier l'horaire des employés très enthousiastes.

Julie Carignan propose quant à elle d'installer un écran dans la cafétéria ou dans une salle pour que les amateurs regardent les matchs durant le dîner et leurs pauses. Écouter une partie importante tous ensemble pourrait aussi être une activité sociale, au même titre que les autres.

«Je ne sais pas si de regarder les matchs en groupe renforce plus les liens que d'organiser un pool qui, lui, crée une certaine ambiance et n'empiète pas trop sur les heures de travail», souligne de son côté Manon Cléroux. Cette dernière estime d'ailleurs que les règles doivent avant tout être cohérentes avec la culture de l'entreprise.

Q Qu'en est-il de l'habillement?

R S'il y a un code vestimentaire strict, si le complet est de mise par exemple, ce n'est pas de bon ton d'arriver vêtu du maillot de son équipe favorite. «Toutefois, si les employés peuvent normalement s'habiller en t-shirt au travail, les employeurs devraient permettre aux membres de leur équipe d'afficher leurs couleurs», dit Manon Cléroux. Autrement dit, on se fie aux règlements déjà en vigueur le reste de l'année.

Les règles peuvent toutefois être légèrement modifiées pour l'occasion, croit quant à elle Julie Carignan. «Pourquoi ne pas alléger le code vestimentaire le vendredi si ça n'affecte pas la sécurité ou la clientèle?», suggère-t-elle.

Q Comment contrer une vague de congés injustifiés?

R À cette question, Julie Carignan voit trois réponses possibles. «Les employeurs pourraient d'abord employer la ligne dure et affirmer qu'aucune absence non justifiée ne sera tolérée», dit-elle. «D'autres gestionnaires pourraient décider d'accepter officieusement ce genre de congés, et ne pas sévir si quelques employés s'absentent. Par contre, les patrons qui optent pour cette option doivent prévoir les horaires en conséquence, pour ne pas se buter à des bureaux complètement vides.»

Et la troisième option? «Être proactif. Les employeurs qui savent déjà que leur espace de travail est truffé de fanatiques de football peuvent aborder la question de front. Ceux-ci peuvent suggérer notamment des congés sans solde», croit Julie Carignan.

Q Quels sont les avantages pour les employeurs?

R «Être flexible a du bon pour les employeurs. Ça montre une reconnaissance des intérêts des employés et ça stimule l'engagement, très recherché de nos jours, note Julie Carignan. Le tout consolide du même coup les liens entre les membres de l'équipe et augmente au passage le sentiment d'appartenance.

Manon Cléroux met toutefois en garde les employeurs. «Les gestionnaires doivent s'assurer que leurs décisions ne sont pas prises en fonction de leurs préférences personnelles. Un patron fan de soccer accepterait-il aussi de modifier l'horaire pour le Festival de Cannes, par exemple?», illustre-t-elle. Encore une fois, il n'y a pas de réponse unique. Tout est une question d'équité et de cohérence.

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LE POINT DE VUE DES EMPLOYÉS

Une étude menée par le bureau anglais du Canadian Life Group Insurance dévoilait en mai dernier que près de 2,4 millions d'employés au Royaume-Uni pensaient prendre un congé de maladie injustifié pour écouter le Mondial 2014. C'est près d'un salarié sur 10. À la question «Quel élément vous encouragerait le plus à ne pas prendre de congés injustifiés?», voici ce que les employés ont répondu:

> Heures de travail flexibles: 35%

> Possibilité de télétravail: 30%

> Regarder les matchs au travail (quand c'est possible): 18%

> Être récompensé pour se rendre au travail: 9%

> Prendre des congés sans solde:5%

> Moins de stigmatisation entourant la prise de congés payés pour un événement sportif: 4%