Des défis, les entrepreneurs et les gestionnaires en rencontrent tous les jours. La Presse vous propose une série d'articles présentant des difficultés et des solutions inspirantes adoptées par des gens sur le terrain. Après le volet juridique de la restructuration la semaine dernière, place à l'aspect communication et transition de carrière.

L'entreprise pétrochimique Pétromont a fermé ses portes officiellement en janvier 2009, après plusieurs mois de fermeture temporaire. «Le président avait rencontré les employés pour expliquer les raisons de la fermeture», se souvient Guy St-François, conseiller en ressources humaines agréé (CRHA), qui était directeur des ressources humaines.

«L'entreprise n'était pas suffisamment flexible en transformation des matières premières comparativement à ses concurrents», raconte M. St-François, aujourd'hui consultant pour les PME en croissance.

Le patron avait précisé aux 325 employés qu'il y avait une mince possibilité de réouverture de l'usine, mais il a lancé sans tarder des activités de transition de carrière.

D'après Danielle Pouliot, consultante en communication, il est très important d'expliquer la situation aux employés de façon objective, cohérente, authentique et complète.

«Ils pourront ainsi comprendre, être sécurisés et devenir des acteurs du changement», précise-t-elle.

Plan de communication

Le plan de communication doit être préparé soigneusement, d'après Danielle Pouliot qui était invitée récemment à un symposium sur le droit du travail organisé par Borden Ladner Gervais.

«Il faut bien connaître les enjeux de l'entreprise et la nécessité du changement pour identifier le message clé que devront répéter tous ceux qui auront à répondre aux questions des employés, explique-t-elle. Un document de questions/réponses doit aussi être rédigé.»

Surtout, n'éludez pas les questions les plus difficiles.

«La nature a horreur du vide, et si l'entreprise ne répond pas à certaines questions, d'autres le feront, et c'est beaucoup plus difficile de réagir à une mauvaise communication que d'en prévoir une bonne», affirme Mme Pouliot.

Guy St-François a remarqué qu'il était important de permettre aux employés de décanter.

«C'est un moment très émotif, et il faut les écouter, explique-t-il. Des psychologues étaient sur place lors de l'annonce et pour le suivi, nous avions élargi notre programme d'aide aux employés.»

«C'est important d'avoir des gens de l'externe, idéalement, pour prendre soin des employés, affirme Michel Nadeau, associé principal chez Vézina Nadeau Labre, un cabinet-conseil en transition de carrière. Pour éviter un dérapage, il faut aussi identifier au préalable les gens les plus vulnérables, comme ceux qui ont déjà été en épuisement professionnel, qui ont divorcé récemment ou qui ont un enfant malade.»

D'après Danielle Pouliot, le plan de communication doit inclure les autres publics: employés maintenus en poste, clients, fournisseurs, partenaires d'affaires, investisseurs.

Il faut aussi prévoir un plan B en cas de coulage dans les médias.

«Il n'y a rien de plus démobilisant pour des employés que d'apprendre la nouvelle dans les médias, affirme Mme Pouliot. On peut alors devancer l'annonce. Si c'est impossible, on envoie une note pour admettre les fondements de la rumeur en précisant qu'on ne peut pas encore faire une annonce ni répondre aux questions, mais que les employés seront les premiers mis au courant lorsque ce sera possible.»

Après l'annonce, on favorise la rétroaction et on s'ajuste au besoin.

Transition de carrière

Le volet transition de carrière mis en place par l'employeur est important lors d'une re-structuration. Pétromont, par exemple, a formé un comité de reclassement.

«On doit choisir les bonnes personnes pour former ce comité parce qu'elles seront porteuses du message sur le plancher, affirme Michel Nadeau. Le comité doit bien cibler les besoins des employés pour offrir des services pertinents. Par exemple, si vous avez des employés non diplômés en poste depuis 25 ans, ils pourraient bénéficier de reconnaissance des acquis pour décrocher un diplôme.»

«Nous avions mis le paquet avec Emploi-Québec, qui a subventionné 50% des activités, indique Guy St-François. Pour encourager la participation, les employés pouvaient prendre leur dernière heure de travail de la journée pour assister à différents ateliers: rédaction d'un CV, recherche d'emploi, réorientation, entrepreneuriat.»

Parfois, un licenciement peut même devenir une occasion de réaliser un vieux rêve.

«L'indemnité de départ était assez compétitive, donc certains employés s'en sont servie pour démarrer leur entreprise, et nous les avons aidés à réaliser leur plan d'affaires», indique M. St-François, qui croit que le fait d'avoir mis rapidement des mesures en place a permis de sécuriser les employés et de leur donner espoir.

Il précise que le taux de replacement avait dépassé 85%.

Lorsque l'entreprise continue de fonctionner, les employés maintenus en poste souhaitent d'ailleurs savoir ce qu'il advient de leurs anciens collègues.

«Il faut faire un suivi du taux de succès du programme de reclassement pour motiver les gens et informer les travailleurs restés en poste, affirme M. Nadeau. Ils seront rassurés de voir qu'on prend soin de leurs anciens collègues.»