Des défis, les entrepreneurs et les gestionnaires en rencontrent tous les jours. La Presse vous propose une série d'articles présentant des difficultés et des solutions inspirantes adoptées par des gens sur le terrain. Cette semaine, alors que le mois d'octobre est consacré au trouble du déficit d'attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H): comment mieux intégrer au travail des gens souffrant de ce trouble neurologique.

Chez Meubles Setlakwe, les vendeurs doivent chaque semaine étiqueter de nouveaux produits. Quelques-uns sont atteints de TDA/H. Celui qui travaille seul se charge de 10 étiquettes, vérifie son travail, puis en prend 10 autres. Lorsque les vendeurs sont plusieurs dans un magasin, ils sont jumelés. L'un lit l'étiquette, l'autre écrit le prix, puis ils échangent leurs rôles pour vérifier le travail.

«Avant, on donnait 200 étiquettes d'un coup à un vendeur et s'il était atteint de TDA/H, on se retrouvait avec plusieurs problèmes de prix», affirme Caroline May Girard, directrice des ressources humaines chez Meubles Setlakwe, à Granby.

«Les erreurs engendraient des coûts énormes et beaucoup de frustration, ajoute-t-elle. Les avis disciplinaires se multipliaient pour ces employés, on ne comprenait pas ce qui se passait, ils se sentaient dévalorisés et partaient.»

S'informer sur ce qu'est le TDA/H: voilà le premier conseil que donne aux patrons Marie-Michèle Lemaire, directrice générale de TDA/H Mauricie-Centre-du-Québec, un organisme à but non lucratif actif notamment auprès d'employeurs.

«Le TDA/H n'est pas lié à l'intelligence, mais la personne a de la difficulté à se concentrer, explique Mme Lemaire. De plus, elle est souvent impulsive.»

Caroline May Girard a compris ce qu'est le TDA/H lorsque ses trois enfants ont reçu ce diagnostic. «Le TDA/H ne m'empêche pas d'embaucher quelqu'un, mais je travaille maintenant différemment avec lui», explique celle qui a détecté une douzaine de personnes atteintes parmi sa centaine d'employés.

L'organisation du travail

Pour donner un coup de pouce aux employés atteints de TDA/H, l'employeur doit être à leur écoute.

«Chaque cas est différent, mais souvent, le travail monotone est très difficile pour eux», affirme Marie-Michèle Lemaire.

C'est vrai pour Josée (nom fictif), atteinte de TDA/H, employée d'un organisme communautaire et étudiante à la maîtrise en sciences sociales.

«Je fonctionne bien lorsque mon travail peut être découpé en plusieurs petites tâches variées», dit-elle.

Différentes stratégies peuvent briser la routine. «Sur une chaîne de montage, on peut faire des rotations de poste chaque mois et dans un centre d'hébergement, les préposés aux bénéficiaires peuvent changer de patients toutes les trois semaines», suggère Mme Lemaire, aussi propriétaire de la Clinique multidisciplinaire TDA/H Mauricie-Centre-du-Québec.

Des patrons remarqueront que plusieurs employés atteints de TDA/H excellent dans le démarrage de projets.

«Ils carburent à l'adrénaline et ils ont une grande créativité, donc le début d'un projet est souvent plus stimulant pour eux que la fin», explique Mme Lemaire.

Plusieurs, comme Josée, fonctionneront bien avec du suivi rigoureux au début d'un nouveau projet.

«J'aime savoir que je suis bien partie, dit-elle. J'aime aussi que ma patronne révise avec moi les priorités parce que j'ai de la difficulté à gérer plusieurs tâches qui s'accumulent. Une fois que je sais où je m'en vais, je peux travailler longtemps! J'ai beaucoup d'énergie.»

Le patron a toutefois intérêt à s'assurer que l'ardeur au travail n'est pas excessive. «Il faut éviter qu'une personne atteinte de TDA/H s'éparpille et joue dans les plates-bandes de ses collègues, car cela risque de créer des conflits, affirme Marie-Michèle Lemaire. Faire une description de tâches et s'y tenir est très bénéfique.»

Un horaire de travail flexible peut aussi faciliter les choses.

«Ceux qui ont de la difficulté à s'endormir le soir seront plus en forme s'ils entrent au travail plus tard, indique Mme Lemaire. Plusieurs fonctionnent aussi très bien avec les récompenses. On peut leur dire, par exemple, que s'ils travaillent très fort toute la semaine, on leur donnera congé vendredi après-midi.»

L'employeur peut également repenser son environnement de travail: bureaux fermés, paravents ou coquilles pour les oreilles afin de réduire les distractions.